Par Dr Tatah Eunice Kisifen
Le Cameroun se trouve à un tournant crucial de son parcours en matière de santé publique. Chaque année, 4 532 personnes meurent au Cameroun (1,74 %) à cause du tabagisme. Alors que les maladies liées au tabac continuent de coûter des milliers de vies chaque année, il est temps d’adopter une approche moderne et fondée sur des données probantes pour lutter contre l’épidémie de tabagisme. La réduction des méfaits du tabac (RMT) propose une solution pragmatique — une approche qui complète les stratégies actuelles de lutte antitabac tout en offrant aux fumeurs adultes des alternatives nettement moins nocives aux produits du tabac à combustion.
Bien que la prévalence du tabagisme au Cameroun soit de 8,9 % (FEUILLE D’INFORMATION DE L’OMS, 2023) — ce qui n’est pas parmi les plus élevées de la région —, l’impact de l’usage du tabac reste profondément préoccupant. Des maladies telles que le cancer du poumon, la bronchopneumopathie chronique obstructive (BPCO), les maladies cardiaques et les AVC sont associées au tabagisme, imposant un lourd fardeau aux familles et mettant à rude épreuve un système de santé déjà tendu, avec environ 85 283 546 495 francs CFA dépensés chaque année pour la lutte antitabac. Chaque année, des décès évitables surviennent en raison de la consommation continue de cigarettes, et à moins d’un changement d’orientation politique, ce bilan ne fera qu’augmenter.
Le Cameroun doit aller au-delà des mesures traditionnelles de lutte antitabac — telles que la fiscalité, les restrictions publicitaires et les interdictions de fumer — et commencer à adopter une stratégie de santé publique plus globale. Un élément central de ce changement est l’adoption de la Réduction des Méfaits du Tabac et des produits qui y sont associés, notamment les cigarettes électroniques, les produits du tabac chauffé et les sachets de nicotine. De nombreuses études indépendantes ont montré que ces innovations présentent une fraction des risques pour la santé comparés aux cigarettes combustibles.
Cependant, la sensibilisation à ces alternatives à risque réduit reste extrêmement faible au Cameroun. De nombreux citoyens, professionnels de santé et même régulateurs ne connaissent pas ces options ou sont mal informés de leurs avantages potentiels. Ce déficit de connaissances a freiné les progrès politiques significatifs et laissé de nombreux fumeurs avec peu d’options pratiques, hormis l’arrêt brutal ou la poursuite du tabagisme.
Pour y remédier, un effort national coordonné est nécessaire pour sensibiliser le public, les régulateurs et les décideurs politiques à l’importance de la RMT et à la science qui la sous-tend. Des campagnes de sensibilisation publiques, fondées sur des données scientifiques et soutenues par des professionnels de santé, des leaders communautaires et des organisations communautaires peuvent aider à dissiper les mythes et à encourager des décisions de santé plus éclairées.
En outre, le Cameroun doit prendre des mesures pour développer un cadre réglementaire proportionné au risque — qui distingue clairement les produits du tabac à combustion à haut risque des alternatives à risque réduit nettement moins nocives. Une telle réglementation offrirait aux fumeurs adultes des alternatives plus sûres tout en continuant à protéger les non-fumeurs et les jeunes grâce à des garanties solides.
De plus, le Cameroun ne doit pas se contenter d’études externes. Il est nécessaire de mener des recherches locales sur les comportements de tabagisme, les perceptions des consommateurs à l’égard des produits à risque réduit (vous pouvez remplacer cela par « connaissances, attitudes et pratiques »), ainsi que sur l’efficacité des interventions de RMT dans le contexte camerounais. Ces données locales seraient utiles pour élaborer des politiques efficaces, culturellement pertinentes et durables.
Intégrer la RMT dans le cadre national de lutte antitabac du Cameroun n’est plus une option — c’est une nécessité. Cela doit aller de pair avec le plaidoyer en faveur de politiques de santé publique modernes, ouvertes à l’innovation, fondées sur la science et centrées sur les résultats de santé à long terme pour tous les citoyens.
Avec la Loi camerounaise sur la lutte antitabac du 26 février 2024 (Ministère de la Santé Publique du Cameroun), actuellement mise en œuvre, le Cameroun a l’opportunité de devenir un leader régional dans le domaine de la lutte antitabac progressive. En adoptant une approche globale et tournée vers l’avenir, le pays peut considérablement réduire les méfaits liés au tabagisme et sauver d’innombrables vies. Le moment d’agir, c’est maintenant. Avec les bonnes politiques, l’éducation et le leadership, le Cameroun peut inverser la tendance des méfaits du tabac et créer un avenir plus sain pour les générations à venir.
Lien vers le rapport Lives Saved : Lives Saved Report
* Basé sur le poids des preuves et en supposant un arrêt complet du tabagisme. Ces produits ne sont pas sans risque et sont addictifs.