Plus de 38 familles endeuillées après les violences post-électorales d’octobre 2025, et pourtant aucune aide officielle n’a été annoncée par les autorités camerounaises. C’est dans ce silence lourd que l’influenceur et lanceur d’alerte Nzui Manto a lancé une cagnotte en ligne, récoltant plus de 8,9 millions FCFA destinés aux proches des victimes. « On ne peut pas laisser nos morts tomber dans l’oubli », a-t-il déclaré sur Facebook, où il rassemble plus d’un million d’abonnés. Mais cette initiative citoyenne soulève une question brûlante : faut-il désormais compter sur les réseaux sociaux pour combler le vide de l’État ?
Nzui Manto, une voix numérique devenue secours social
La campagne “Cagnotte en faveur des familles des Camerounais tués par Paul Biya” a pris de l’ampleur en quelques jours, portée par la diaspora et des internautes choqués par les images de répression qui ont circulé sur WhatsApp et TikTok.
Selon les chiffres publiés par Nzui Manto :
| Source de collecte | Montant |
|---|---|
| PayPal | 9 590 € |
| Virement bancaire | 4 043 € |
| Total | 13 633 € ≈ 8 900 000 FCFA |
Avec cet argent, chaque famille reçoit 200 000 FCFA.
Les bénéficiaires sont invités à le contacter directement :
« Les familles des 38 Camerounais sont priées de me joindre », a-t-il annoncé.
Ce geste, dans un Cameroun où la parole est souvent verrouillée, a été perçu comme une forme de justice populaire.
Une solidarité qui révèle l’absence de l’État
À Yaoundé, Douala, Bafoussam ou Maroua, le constat est le même : la majorité des familles concernées vivent dans la précarité.
Et aucune prise en charge publique officielle n’a été communiquée.
Un habitant de Nkoldongo résume :
« C’est maintenant Facebook qui enterre nos morts ? »
Pendant que la classe politique débat, la diaspora s’organise.
Ce phénomène n’est pas nouveau, mais il s’accélère :
- Diaspora = principal financier informel des familles
- Influenceurs = relais émotionnels et médiatiques
- État = silencieux ou distant
Cette dynamique modifie profondément les équilibres d’autorité et de confiance.
➡️ Le peuple écoute désormais plus les réseaux que les institutions.
Un tournant dans l’activisme camerounais en ligne
L’action de Nzui Manto confirme deux réalités contemporaines :
- Les réseaux sociaux sont devenus un contre-pouvoir.
- La diaspora joue le rôle de secours national d’urgence.
Pour de nombreux Camerounais, cette cagnotte n’est pas seulement une aide financière :
c’est un acte de mémoire, une manière d’écrire l’histoire depuis le peuple, hors des récits officiels.
L’initiative de Nzui Manto est saluée, discutée, parfois critiquée, mais elle existe parce qu’un vide existe.
Un vide humain, institutionnel, symbolique.
La question demeure :
Qui, demain, prendra soin des familles lorsque la douleur ne fera plus la une des réseaux sociaux ?
