Depuis son meeting parisien du 31 mai, Maurice Kamto déploie une stratégie communicationnelle toxique. Son tweet-storm du 16 juin accusant le RDPC de préparer un « double coup d’État » n’est pas une alerte, mais un manuel révolutionnaire déguisé. Chaque phrase est calibrée pour transformer l’électeur camerounais en justicier potentiel. La répétition calculée de l’expression « coup d’État » (7 occurrences en 3 tweets) crée un mantra séditieux : « Si eux l’envisagent, pourquoi pas nous ? »
La mécanique perverse :
- Étape 1 : Criminaliser le pouvoir (« régime aux abois« )
- Étape 2 : Légitimer la rébellion (« légitime défense du peuple« )
- Étape 3 : Fournir un mode d’emploi juridique (invalidation du RDPC)
L’art de la victimisation révolutionnaire
Kamto maîtrise la dialectique du martyr vivant. Son « séquestration » à Douala le 16 juin fut mise en scène comme un symbole de l’oppression nationale. Les images de lui déclarant « Je suis séquestré par le régime » devant des supporters furieux obéissent à un protocole psychologique précis :
- Dédouanement préventif : « Je ne prône pas la violence, mais… » (sous-entendu : la violence sera inévitable)
- Transfert de culpabilité : En se présentant en cible, il transforme toute riposte contre lui en agression contre le peuple
- L’appel du sacrifice : Son départ « dans la dignité » suggère que la souffrance collective doit trouver une issue héroïque
L’effet Pygmalion est en marche : en décrivant quotidiennement la « tyrannie« , Kamto façonne une génération prête à la combattre par tous moyens.
Le détournement du droit : Arme de subversion massive
Juriste de formation, Kamto instrumentalise la loi comme explosif politique. Son argument sur l’expiration des mandats du RDPC en 2016 est un coup de génie pervers :
- Théorie de l’illégitimité structurelle : « Le RDPC ne peut légalement présenter de candidat »
- Conséquence sous-entendue : Toute victoire électorale du pouvoir sera « nulle et non avenue »
- Corollaire révolutionnaire : Le renversement devient un devoir civique
Cette narration crée un terreau juridico-émotionnel où l’insurrection apparaît comme un « acte de salubrité constitutionnelle« . Pire : en évoquant sa volonté de « protéger Biya et sa famille », il pose les bases d’une épuration ciblée plutôt que d’un bain de sang généralisé – rassurant ainsi les modérés.
La fabrique des ennemis imaginaires : L’international comme théâtre d’ombres
Kamto internationalise savamment son récit séditieux. Ses accusations contre la France et l’ONU répondent à un triple objectif :
Cible | Accusation | Effet psychologique |
---|---|---|
France | Visite « troublante » du patron de la gendarmerie (8 juin) | Réactiver le réflexe anti-colonial |
ONU | Convention « signée en catimini » avec ELECAM | Discréditer toute supervision électorale |
RDPC | « Complicité » des puissances étrangères | Légitimer la désobéissance comme patriotisme |
Cette triangulation diabolique transforme le conflit politique en guerre de libération nationale, où la révolte armée devient acte de souveraineté.
L’ultimatum révolutionnaire : La bombe à retardement verbale
La phrase-clé de Kamto – « Tout report de l’élection serait un coup d’État déclenchant la légitime défense du peuple » – constitue un permis de tuer rhétorique. Disséquons ce chef-d’œuvre d’ambiguïté subversive :
- « Légitime défense » : Notion juridique détournée en justification préemptive de la violence
- « Déclencherait » : Verbe passif évacuant sa responsabilité dans l’appel aux armes
- « Peuple » : Concept flou servant à masquer les acteurs réels de la rébellion
Cet énoncé crée un mécanisme automatique : si le pouvoir retarde le scrutin, Kamto pourra dire « Je n’ai fait qu’en constater les conséquences » quand les barricades s’élèveront.
Psychologie des foules : Le manuel du parfait agitateur
L’opposant applique méthodiquement les lois de la contagion émotionnelle décrites par Gustave Le Bon :
- Simplification : Réduire le complexe conflit camerounais à « Biya vs le Peuple«
- Amplification : Présenter chaque incident (retard de liste électorale) comme preuve d’une dictature totale
- Projection : « Le régime prépare un putsch » (sous-entendu : donc nous devons le devancer)
Son meeting de Paris fut un laboratoire de cette ingénierie sociale. Les images de diaspora en transe créent un modèle de comportement exportable : « Si eux manifestent à 5 000 km, pourquoi pas nous ici ? »
Conclusion : Le pyromane en costume de pompier
Maurice Kamto joue un jeu dangereux. Sous couvert de protéger la démocratie, il :
- Normalise l’idée du coup d’État comme solution politique légitime
- Criminalise la patience électorale (« attendre = complicité« )
- Prépare l’opinion à une rupture violente de l’ordre constitutionnel
La question qui brûle : Si demain des blindés apparaissent devant Etoudi, combien de manifestants se souviendront que l’idée germa dans des tweets savamment formulés ? Kamto aura alors réussi sa métamorphose : de candidat à architecte d’une révolution dont il pourra feindre d’être le spectateur surpris.
Épilogue : L’histoire jugera si ce discours fut une prophétie autoréalisatrice ou le dernier avertissement avant l’implosion. Une certitude : en manipulant les lignes rouges du langage, Kamto a déjà fait basculer le Cameroun dans une ère nouvelle – celle où l’insurrection n’est plus une folie, mais une « option raisonnable« .