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La filière maïs sous pression, entre déficit structurel et coûts de production élevés


(Investir au Cameroun) – Première céréale cultivée au Cameroun et pilier de la sécurité alimentaire nationale, le maïs occupe une place stratégique dans l’économie rurale. Consommé à près de 75 % par les ménages et mobilisant plus de six millions d’acteurs le long de sa chaîne de valeur, il demeure pourtant chroniquement déficitaire. C’est l’un des constats majeurs du rapport 2024 sur la compétitivité de l’économie camerounaise, publié par le Comité de compétitivité rattaché au ministère de l’Économie.

Malgré une production annuelle moyenne de 2,2 millions de tonnes entre 2017 et 2021, l’offre reste inférieure à une demande évaluée à 2,8 millions de tonnes dès 2019. Portée par la croissance démographique et par l’essor des industries agroalimentaires – élevage, minoteries, amidonneries –, cette demande progresse plus vite que la production. Le pays se retrouve face à un déficit structurel, aggravant une balance commerciale déjà fragile.

Importations en forte hausse et fuites transfrontalières

La pression s’est accentuée en 2024 : les importations ont atteint 81 833 tonnes, en hausse de 103,1 % sur un an. Sur cinq ans, elles ont presque triplé, portant la facture à 19,4 milliards de FCFA, contre environ 8,5 milliards en 2010. L’Argentine demeure le principal fournisseur.

Paradoxalement, malgré ces importations massives, environ 50 000 tonnes s’échappent chaque année via des flux informels vers les pays voisins. Ce phénomène révèle une désorganisation du marché intérieur et accentue un déséquilibre auquel s’ajoutent des pertes post-récoltes estimées à 11 % de la production.

Avec un rendement moyen de 1,8 tonne par hectare en 2023, le Cameroun reste loin des standards mondiaux de 5,9 tonnes par hectare et des performances de pays africains comme l’Afrique du Sud, qui atteint 6,4 tonnes par hectare. La production nationale progresse de 2,2 % chaque année, alors que la population augmente de 2,8 %, ce qui accentue le déficit.

Ce retard s’explique par un modèle agricole dominé par de petites exploitations familiales faiblement mécanisées et peu dotées en intrants. Le rapport souligne que « le coût de production direct d’un hectare de maïs est estimé à environ 428 000 FCFA », un niveau alourdi par le faible accès aux semences certifiées, aux fertilisants et par l’absence d’infrastructures de séchage et de stockage adéquates.

Moderniser pour réduire la dépendance extérieure

Pour inverser la tendance, le Comité de compétitivité recommande d’accélérer la modernisation de la filière en développant des exploitations agricoles de grande taille capables de réaliser des économies d’échelle. Il insiste également sur la nécessité de renforcer le segment semencier, d’encourager l’adoption de variétés hybrides adaptées aux conditions locales, de promouvoir la mécanisation et de doter le pays d’infrastructures de stockage modernes. Le rapport souligne enfin l’importance d’un meilleur accès au financement agricole, indispensable pour soutenir les producteurs tout au long du cycle de production.

Dans un contexte de demande intérieure croissante, ces réformes sont jugées essentielles pour réduire la dépendance extérieure et repositionner durablement la filière maïs comme un moteur de souveraineté alimentaire et de compétitivité économique.

Amina Malloum





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