View Kamer

Issa Tchiroma ► Du régime Biya à la révolte


Garoua, Douala, Yaoundé — il a traversé les prisons, les honneurs et les trahisons du pouvoir. À 75 ans, Issa Tchiroma Bakary revient sur la scène politique comme une tempête. Ancien ministre loyal du régime Biya, il s’est transformé en figure d’opposition redoutée, revendiquant sa « vérité des urnes » après la présidentielle du 12 octobre 2025. De Yoko à Garoua, son parcours raconte l’histoire d’un homme que rien, pas même la peur, n’a pu briser. Alors, Tchiroma est-il en passe de devenir le symbole d’une revanche politique inattendue ?

De prisonnier à ministre : le survivant du système Biya

Tout commence en avril 1984, au cœur d’une tentative de coup d’État.
De jeunes officiers du Nord veulent renverser Paul Biya. La répression est immédiate : des centaines de militaires et civils sont exécutés.
Parmi les suspects arrêtés, un ingénieur ferroviaire de Garoua : Issa Tchiroma Bakary.
Accusé sans preuve, il est jeté dans la prison de Yoko, un enfer carcéral où beaucoup ne survivent pas.

« Chaque jour, je voyais la mort en face. Mais j’ai juré qu’un jour, je parlerais pour ceux qu’on a fait taire », confiera-t-il plus tard à un journaliste.
Six années passent. Six années de silence, de privation, de méditation. À sa sortie, il n’est plus le même homme.

L’ascension fulgurante et les désillusions du pouvoir

Libéré, Tchiroma rejoint le parti de Bello Bouba Maïgari (UNDP), figure montante du Nord. En 1992, il devient ministre des Transports, symbole d’une réconciliation politique fragile.
Paul Biya, séducteur politique aguerri, le rappellera à plusieurs reprises dans ses gouvernements.
Tchiroma, devenu l’un des porte-voix du « Renouveau », se distingue par son franc-parler : il défend le président avec fougue, parfois avec excès.

Mais derrière cette fidélité apparente, le doute grandit. Le « diable du Nord », comme le surnomment ses adversaires, voit le système se refermer sur lui. Les promesses non tenues, les inégalités persistantes dans le septentrion, la centralisation du pouvoir à Yaoundé… tout cela finit par l’étouffer.
En 2020, il claque la porte du gouvernement, isolé mais plus libre que jamais.

Le retour du “bon diable”

En 2025, l’histoire lui offre une revanche.
Avec la disqualification de Maurice Kamto, la scène politique se vide d’un rival majeur.
Tchiroma saisit sa chance. Son ton est direct, populaire, mordant :

« On a confisqué le pays pendant quarante ans. Cette fois, le peuple doit reprendre sa voix. »

Dans les marchés de Garoua, de Maroua ou de Ngaoundéré, son discours fait mouche.
Les foules crient son nom, les jeunes brandissent ses portraits.
Le vieux renard politique retrouve ses instincts : proximité, rupture, vérité crue.
Le pouvoir, d’abord amusé, commence à s’inquiéter.

Un combat symbolique contre le temps et le régime

L’ancien ministre sait que son combat dépasse sa personne.
Il parle pour « ceux du Nord oubliés », mais aussi pour tous les Camerounais qui réclament un vrai changement.
« Ce pays doit respirer », répète-t-il.
Ses détracteurs l’accusent d’opportunisme ; ses partisans voient en lui un survivant du système Biya devenu sa plus grande menace.

Qu’on l’aime ou qu’on le craigne, Tchiroma incarne la résistance d’une génération qui a tout connu : la prison, le pouvoir, la trahison et la renaissance.

Alors, la question demeure :
👉 le vieux lion du septentrion rugira-t-il assez fort pour réveiller le Cameroun ?



Source link

View Kamer

FREE
VIEW