View Kamer

Issa Tchiroma → Biographie Complète Candidat 2025


Issa Tchiroma Bakary, l’homme qui incarne les paradoxes de la politique camerounaise, s’est imposé comme l’une des figures les plus controversées et influentes de l’élection présidentielle 2025. De l’ingénieur ferroviaire emprisonné en 1984 au ministre fidèle devenu opposant farouche, ce septuagénaire de Garoua bouscule tous les codes. Son récent blocage à l’aéroport de Nsimalen alors qu’il tentait de se rendre au Sénégal symbolise parfaitement les tensions d’un scrutin où l’ancien défenseur de Paul Biya pourrait bien devenir son principal rival.

Les racines d’un destin politique exceptionnel

De Garoua aux écoles françaises : Une formation d’excellence

Né vers 1946 à Garoua, Issa Tchiroma Bakary fait ses études primaires à l’École Principale de Garoua, où il obtient le CEPE avant d’entrer au Centre d’Apprentissage du chemin de fer de la REGIFERCAM de Douala. Cette première orientation professionnelle marquera profondément sa carrière.

Le jeune homme poursuit sa formation technique en accédant au Cours Supérieur Professionnel du deuxième degré de Douala. Mais c’est son départ pour la France qui transforme définitivement sa trajectoire. Il obtient le Baccalauréat C à Paris, au cours de l’année scolaire 1970-1971. De 1971 à 1974, il suit des études à l’École Supérieure des Cadres de Chemin de Fer Français ; il en sort ingénieur. Et de 1974 à 1976, il est régulièrement inscrit à l’Institut Supérieur des Matériaux et de la Construction, où il obtient le diplôme d’ingénieur.

Les premières années à la REGIFERCAM

Fort de cette double formation d’ingénieur, il rentre au Cameroun et débute sa carrière le 02 janvier 1977 aux ateliers de la REGIFERCAM à Bassa (Douala) où il assume les responsabilités de chef de Section de Groupe Électronique, Chef du Dépôt, Inspecteur de la Formation Professionnelle, Chef de Service Entretien Général.

Cette période de stabilité professionnelle s’achève brutalement en 1984 avec un événement qui marquera à vie le futur homme politique.

L’épreuve du feu : Prison et renaissance politique

Six années derrière les barreaux

Alors qu’il pensait s’être mis à l’abri en évitant tout engagement politique, celui que tous les Camerounais appellent familièrement Tchiroma est arrêté en avril 1984 en raison de son appartenance à la région nord du Cameroun dont les cadres étaient alors suspectés d’être derrière le coup d’État fomenté contre Paul Biya. Tchiroma va ainsi connaître pendant 6 années les affres de la détention.

Cette expérience carcérale, loin de le briser, forge son caractère et sa détermination. Il en sortira endurci en 1990 au point de s’engager ouvertement avec d’autres activités comme l’avocat Yondo Black dans la revendication en faveur des droits civiques et politiques au Cameroun.

L’engagement pour la démocratie

Sa libération en 1990 coïncide avec l’émergence du multipartisme au Cameroun. Pendant cette période, Tchiroma choisit la posture de pourfendeur le plus talentueux du régime de Paul Biya. L’attelage improbable et opportuniste avec Me Yondo Black va ainsi déboucher sur le multipartisme.

Il rejoint l’Union nationale pour la démocratie et le progrès (UNDP) aux côtés de Samuel Eboua et Bello Bouba Maïgari, où il obtient le poste de Secrétaire national chargé de l’administration.

L’irrésistible ascension ministérielle

Le tournant de 1992 : Premier portefeuille

L’année 1992 marque un tournant décisif. En 1992, à la surprise générale Issa Bakary Tchiroma, qui jure aujourd’hui encore qu’il n’a rien demandé à personne, devient ministre des Transports. Il ne refuse pourtant pas le maroquin ministériel, accréditant chez ses camarades l’idée d’un arrangement dans leur dos.

Cette nomination du 27 novembre 1992 provoque un séisme à l’UNDP. Son entrée au gouvernement du 27 novembre 1992 ayant suscité de vives critiques au sein de l’UNDP, Issa Tchiroma Bakary est exclu du parti avec son acolyte Hamadou Moustapha le 21 janvier 1995 par le Comité Central dudit parti, par 106 voix pour 4 contre.

La création de ses propres formations politiques

Exclu de l’UNDP, Tchiroma refuse de subir et crée ses propres formations. Les deux hommes politiques décident de créer leur propre parti, l’ANDP en 2002, avant qu’Issa Tchiroma ne fonde en 2007 le Front pour le salut national du Cameroun (FSNC), sa formation politique actuelle.

Tchiroma crée le Front national pour le salut du Cameroun (FNSC), sa formation politique, et devient à partir de cet instant l’avocat le plus zélé de son bienfaiteur Paul Biya qui le lui rend bien en lui garantissant une longévité au gouvernement.

L’Âge d’or : Ministre de la communication et porte-parole

Le poste de sa vie : 2009-2019

Revenu au gouvernement en 2009 après une traversée de désert, Tchiroma décroche le job de sa vie : ministre de la Communication, mais surtout ministre de la parole de Paul Biya et du gouvernement. Cette décennie le propulse au premier plan de la scène politique camerounaise.

Durant ces dix années cruciales, Issa Tchiroma développe une réputation de défenseur intraitable du régime. « Quand, je prends la parole au nom du gouvernement, je dis les faits« , lance-t-il à un journaliste qui voulait douter de son explication. Pendant dix années, Issa Tchiroma Bakary va se montrer intraitable dans la défense de Paul Biya.

Formules chocs et défense du régime

Son style direct et ses formules percutantes marquent l’époque. « Le Cameroun est une Nation qui carbure aux défis« , dira-t-il un jour à ceux qui ont eu l’audace de penser que son pays ne sera pas prêt pour l’organisation de la Coupe d’Afrique des Nations 2019. « Le peuple est derrière son chef », lance-t-il à un autre journaliste qui insinuait que Biya soit contesté au Cameroun.

Il n’hésite pas à justifier les voyages présidentiels controversés : « Comme tout travailleur, le président Biya a droit à des vacances qu’il est libre de payer avec l’argent mis à sa disposition par le peuple souverain »

Ministre de l’emploi : Le passage dans l’ombre

Changement de portefeuille en 2019

À la faveur du dernier remaniement du gouvernement intervenu en 2019, Tchiroma a changé de portefeuille. Devenu ministre de l’Emploi et de la formation professionnelle, il est donc moins présent dans les médias. Ses compatriotes regrettent ce passage de la lumière à l’ombre.

Ce poste moins exposé lui permet néanmoins de garder une influence tout en préparant discrètement sa stratégie politique future.

Controverses sur l’enseignement supérieur

Même dans ce nouveau rôle, Tchiroma n’échappe pas aux polémiques. Issa Tchiroma Bakary, le Ministre de l’Emploi et de la Formation Professionnelle a créé une grosse polémique en déclarant au cours d’un forum sur l’emploi à Douala que certaines facultés des universités du Cameroun comme l’histoire, la géographie ou encore les lettres conduisent les étudiants au chômage.

Retour aux sources : Notable traditionnel de Garoua

Double casquette : Politique et traditionnelle

Parallèlement à sa carrière ministérielle, Issa Tchiroma cultive ses racines traditionnelles. Dans un pays où, sauf à être dans les bonnes grâces de Paul et Chantal Biya, le poste de ministre est un emploi précaire, Tchiroma est retourné à ses racines de notable de la chefferie traditionnelle de Garoua, dans le Nord. Succédant à son père Tchiroma Bakary, l’ancien ministre de la parole s’est fait désigner « notable supérieur« , chargé de mission auprès du nouveau Lamido de Garoua, Ibrahim El Rachidine.

Cette fonction traditionnelle renforce son ancrage local et sa légitimité dans le Nord-Cameroun, base électorale cruciale pour ses ambitions nationales.

Le FSNC : Construction et épreuves d’un parti politique

Implantation territoriale stratégique

Le Front pour le salut national du Cameroun, créé en 2007, s’est progressivement structuré comme force politique régionale significative. Au sortir des élections municipales et législatives de février 2020, le Fsnc avait remporté les mairies de Lagdo, Pitoa, Ouro-. Celles de Bibemi et Garoua 3 n’avaient échappé au contrôle du Fsnc que de justesse.

Cette implantation dans le département de la Bénoué constitue le socle électoral du parti et d’Issa Tchiroma.

Tensions internes et défections

Cependant, le parti traverse des turbulences. Très distantes depuis quelques mois, les relations entre les deux premières personnalités du Front de salut national du Cameroun (Fsnc) se sont définitivement rompues ce 8 juillet 2025, avec l’autorisation accordée par le ministre de l’Administration territoriale pour le fonctionnement de son parti, la All Cameroonian Congressistes (ACC) créé par son ancien numéro 2, Ousmanou Aman Sa’aly.

D’autres défections touchent le parti, notamment l’ex-Secrétaire Général du FSNC qui a rejoint le MRC de Maurice Kamto.

Allégations de sabotage numérique

Plus récemment, Issa Tchiroma dénonce des manœuvres de déstabilisation. Le président du FSNC affirme que le site internet officiel de collecte de dons électoraux a été purement et simplement piraté, paralysant une partie cruciale de leur stratégie numérique. Dans la foulée, la page Facebook officielle du parti a été bloquée, privant la formation d’un canal majeur de communication directe avec ses militants et le public camerounais.

La rupture historique : De ministre à candidat

Démission spectaculaire du 24 Juin 2025

Le 24 juin 2025, Issa Tchiroma Bakary démissionne du gouvernement et, en moins de vingt-quatre heures, officialise sa candidature à l’élection présidentielle camerounaise de 2025. Cette séquence éclair marque la fin d’une alliance de plus de trente ans avec Paul Biya.

La rapidité de cette transition – démission un jour, candidature le lendemain – témoigne d’une préparation minutieuse et d’une détermination sans faille.

Programme et vision pour 2025

Dans sa lettre aux Camerounais, « Je suis candidat à la présidence de la République, parce que je rêve d’un Cameroun qui s’affirme avec force sur la scène internationale« , a déclaré Issa Tchiroma Bakary.

Il appelle à rompre avec « un modèle en place depuis des décennies qui a montré ses limites« , et à réconcilier un pays confronté à plusieurs crises : insécurité dans les régions anglophones et dans l’Extrême-Nord, tensions sociales, économie en crise et climat politique tendu à l’approche du scrutin.

Candidat de la transition et défenseur de la démocratie

Positionnement stratégique

L’ancien ministre Issa Tchiroma Bakary a tenu une conférence de presse ce vendredi 25 juillet 2025 à Yaoundé, annonçant sa candidature à l’élection présidentielle du 12 octobre prochain et se positionnant comme le « Candidat de la Transition ».

Ce positionnement lui permet de se démarquer des autres candidats tout en capitalisant sur son expérience gouvernementale.

Soutien inattendu à Maurice Kamto

Dans une démarche surprenante pour un ancien ministre, Issa Tchiroma Reconnaissant l’exclusion de Kamto de la course électorale d’octobre 2025, il a remis en question l’intégrité du processus de l’Elecam, soulignant que Kamto avait probablement rempli toutes les conditions légales et procédurales. « Compte tenu de l’expertise juridique internationalement reconnue du professeur Kamto, je suis convaincu qu’il a pris toutes les mesures nécessaires pour s’assurer que sa candidature répondait aux normes légales », a-t-il déclaré.

Cette prise de position en faveur de la réhabilitation de Maurice Kamto illustre sa volonté de crédibiliser le processus électoral, même au risque de contrarier le pouvoir.

L’incident de Nsimalen : Symbolique d’un régime tendu

Interdiction de voyage controversée

L’épisode du 31 juillet 2025 cristallise les tensions. Selon les informations recueillies, Issa Tchiroma tentait de se rendre au Sénégal pour se recueillir sur la tombe de l’ancien président Ahmadou Ahidjo, geste hautement symbolique à trois mois de l’élection.

À 08h40 dans le hall de départ de l’aéroport international de Nsimalen, Issa Tchiroma Bakary avait déjà pris place dans un vol Air Sénégal à destination de Dakar. Il ne prévoyait rien de plus subversif qu’un pèlerinage familial sur les tombes des proches d’Ahmadou Ahidjo – un acte de réconciliation historique que le parti au pouvoir avait pourtant juré vouloir. Pourtant, avant que les portes ne se ferment, des officiers en uniforme sont montés à bord, ont demandé à l’ancien ministre de la Communication de les suivre, et l’ont ramené avec sa fille à travers la passerelle d’embarquement.

Réaction et message de résistance

Face à cette interdiction, Issa Tchiroma livre dans le document source un message de défiance : « Lorsqu’un candidat à l’élection présidentielle est empêché de voyager, c’est tout un peuple qu’on empêche de respirer. C’est la preuve éclatante que le système en place redoute la vérité et craint la transition que nous portons. »

Il appelle à l’unité de l’opposition : « Opposition, société civile, diaspora, patriotes lucides, unissons-nous pour dire stop à la confiscation du pouvoir. »

Impact et enjeux pour l’élection 2025

Recomposition du paysage politique

La candidature du ministre s’inscrit dans un contexte politique marqué par des recompositions en coulisses. Comme Issa Tchiroma Bakary, longtemps perçu comme l’un des porte-voix du régime, plusieurs soutiens traditionnels du président Paul Biya semblent prendre leurs distances.

Son parcours pourrait inspirer d’autres cadres du régime tentés par l’opposition, créant un effet de cascade potentiellement déstabilisant pour le RDPC.

Potentiel électoral et défis

Des 13 candidats retenus en première instance par Elections Cameroon (ELECAM) en vue de l’élection présidentielle, ISSA TCHIROMA BAKARY se démarque nettement comme celui que les Camerounais aimeraient voir succéder à un Paul BIYA usé par le pouvoir.

Cependant, ses moyens restent limités face à la machine du RDPC. Son principal atout réside dans sa connaissance intime du système et sa crédibilité d’ancien ministre ayant rompu avec le régime par conviction.

La figure d’Issa Tchiroma Bakary incarne parfaitement les mutations profondes de la société camerounaise. De l’ingénieur ferroviaire emprisonné en 1984 au candidat présidentiel bloqué à Nsimalen en 2025, son parcours reflète quarante ans de transformations politiques nationales.

Homme de paradoxes et de convictions, ancien fidèle devenu opposant déterminé, il représente une génération politique en quête de renouveau. Sa candidature, même si elle reste difficile face au système qu’il connaît mieux que quiconque, pourrait bien marquer un tournant dans l’histoire électorale camerounaise.

Son expérience unique du pouvoir constituera-t-elle un atout décisif pour convaincre les électeurs camerounais ?



Source link

View Kamer

FREE
VIEW