Une nouvelle ère linguistique s’ouvre au Niger. Selon la Charte de la refondation, document fondamental qui régit les pouvoirs publics durant la période de transition, le haoussa vient d’être officiellement instauré comme langue nationale du pays. Cette décision historique marque un tournant dans la politique linguistique nigérienne et s’inscrit dans une volonté claire de revalorisation du patrimoine culturel local.
Un bouleversement symbolique du paysage linguistique national
La Charte de la refondation reconnaît plus de dix langues parlées sur le territoire nigérien, dont l’arabe, le kanuri et le buduma. Mais c’est le haoussa, langue majoritaire dans le pays, qui obtient désormais le statut prestigieux de langue nationale. Cette promotion linguistique, comme l’a récemment analysé 237online.com dans son dossier sur les mutations identitaires en Afrique de l’Ouest, traduit une volonté politique profonde d’ancrage dans les valeurs africaines authentiques.
Parallèlement, le français et l’anglais ont été relégués au rang de simples « langues de travail », un déclassement symbolique fort qui témoigne d’une distanciation croissante vis-à-vis de l’héritage colonial.
Une rupture consommée avec la francophonie institutionnelle
Cette décision s’inscrit dans un mouvement plus large de rupture avec l’influence française. En mars 2025, le Niger avait déjà annoncé son retrait de l’Organisation internationale de la Francophonie (OIF), marquant ainsi sa volonté d’émancipation culturelle et linguistique.
Cette orientation reflète les tensions diplomatiques persistantes entre Niamey et Paris depuis le coup d’État militaire de 2023. Le général Abdourahamane Tiani, chef de la junte au pouvoir, poursuit ainsi sa stratégie de rupture avec l’ancienne puissance coloniale tout en renforçant ses liens avec d’autres partenaires régionaux et internationaux.
Le choix du haoussa comme langue nationale pourrait également avoir des implications régionales importantes, cette langue étant parlée par plus de 80 millions de personnes en Afrique de l’Ouest, notamment au Nigeria voisin, facilitant potentiellement les échanges culturels et économiques transfrontaliers.