(Investir au Cameroun) – La Commission bancaire de l’Afrique centrale (Cobac), le régulateur du secteur bancaire dans la zone Cemac (Cameroun, Congo, Gabon, Guinée équatoriale, RCA et Tchad), vient de délivrer les premières autorisations d’ouverture de succursales bancaires dans cet espace communautaire, conformément au règlement portant agrément unique des établissements de crédit, adopté le 20 décembre 2024. Ces autorisations ont été délivrées au banquier camerounais Afriland First Bank ; à la filiale camerounaise de l’établissement financier marocain Wafacash, qui opère dans le transfert d’argent ; et au banquier marocain Banque of Africa (BOA), implanté au Congo depuis 2022 après avoir pris la gestion de La Congolaise de Banque (LCB).
De bonnes sources, grâce au quitus de la Cobac, Afriland First Bank, le leader du marché bancaire camerounais, entend accélérer son déploiement au Congo, en République centrafricaine (RCA) et au Tchad. « Ces implantations devraient se faire sur le court terme. En interne, nous sommes prêts, aussi bien en ce qui concerne les ressources humaines que la mobilisation des fonds. Ce qui pourrait nous freiner un peu c’est la nécessité de descendre sur le terrain pour pouvoir prospecter les locaux, par exemple», souffle une source autorisée au sein de la holding financière fondée par le milliardaire camerounais Paul Kammogne Fokam.
Selon le cas, les autorisations du régulateur bancaire permettent au groupe bancaire camerounais d’accélérer son arrivée sur des marchés ciblés depuis quelques années, ou alors sur lesquels il contribue déjà au développement de projets industriels. A titre d’illustration, le marché tchadien est dans le viseur d’Afriland First Bank depuis au moins l’année 2022.
Le Tchad, « un bon risque »
En effet, c’est au sortir d’une audience au ministère des Finances et du Budget à Ndjamena le 11 mai 2022, que le directeur général d’Afriland First BanK avait officiellement révélé l’intérêt du groupe pour le Tchad. « Le Tchad est un pays qui regorge d’énormes potentialités économiques. C’est un marché aux perspectives d’évolution prometteuses, qui bénéficie d’un positionnement géostratégique unique. Avec une population jeune et dynamique, le pays représente à nos yeux un bon risque à prendre », avait indiqué Célestin Guéla Simo.
Le 15 avril 2025, le gouvernement centrafricain a signé avec d’industriel indien Mahasakthi Group, une convention d’investissement portant sur un projet d’environ 800 milliards de FCFA, combinant agro-industrie et production de l’électricité. Le projet, articulé autour de la construction d’un complexe dédié à la culture et la transformation de la canne à sucre (20 000 hectares) et du manioc (10 000 hectares), puis à la production de 70 MW d’électricité, a été ficelé par Afriland First Holding (AFH). Il s’agit du véhicule d’investissement lancé en 2022 au Togo par Afriland First Group, holding financière fondée à Genève et contrôlée par Paul Kammogne Fokam.
135 banques dans l’Uemoa, 54 dans la Cemac
L’ouverture de succursales au Tchad, en RCA et au Congo permettra au Camerounais Afriland First Bank de relancer l’extension de sa voilure dans la zone Cemac, après son retrait à la fois précipité et quelque peu bruyant de la Guinée équatoriale il y a quelques années. Ces nouvelles implantations contribueront à la densification du réseau bancaire sous-régional, tel que voulu par le règlement instituant l’agrément bancaire unique en zone Cemac, qui facilite l’ouverture de succursales pouvant ensuite être transformées en filiales bancaires.
En effet, le nouveau « dispositif confère aux établissements de crédit, déjà titulaires d’un agrément initial dans l’un des Etats membres de la Cemac, la possibilité d’étendre leurs activités dans un autre Etat membre. Ainsi, ils peuvent y implanter une succursale sans avoir à accomplir de nouvelles formalités administratives pour l’obtention d’un agrément dans l’Etat d’accueil », explique le gouverneur de la Banque des Etats de l’Afrique centrale (BEAC), Yvon Sana Bangui, dans un communiqué publié le 14 février 2025.
L’agrément unique pourrait permettre à la Cemac de rattraper son retard en matière de développement du secteur bancaire, en comparaison avec les autres sous-régions. Officiellement, la zone Uemoa, par exemple, totalise 135 banques agréées à fin juillet 2025, dont 29 au Sénégal et 28 en Côte d’Ivoire. Dans le même temps, seulement 54 banques sont actives dans la Cemac, dont 19 au Cameroun.
Brice R. Mbodiam