Cemac : portées par le Cameroun, les banques déjouent les plans de la BEAC avec une hausse des crédits de 19,6% en 2024


(Investir au Cameroun) – Dans son Bulletin économique et statistiques du mois de mars 2025, publié le 18 juin 2025, la Banque des Etats de l’Afrique centrale (BEAC), l’institut d’émission des pays de la Cemac (Cameroun, Congo, Gabon, Guinée équatoriale, Tchad et RCA), révèle qu’en 2024 les crédits à l’économie en zone Cemac ont cru de 19,6% en glissement annuel. Portée par le Cameroun, qui abrite près de 40% du réseau bancaire de la sous-région, la dynamique observée sur le marché du crédit en 2024 – 12 670,1 milliards de FCFA au total – traduit « un renforcement soutenu de l’activité économique régionale, notamment dans les secteurs tels que l’industrie et les services », souligne la BEAC.

« De l’analyse de l’évolution des crédits par maturité, il ressort une augmentation des crédits suivant diverses maturités. Sur la période, il est observé une hausse des crédits à moyen terme de 19,4%, une hausse des crédits à court terme de 19,7% et une expansion des crédits à long terme à hauteur de 21,2%. Les contributions des crédits à court et moyen termes à l’expansion des concours bancaires à l’économie sont respectivement de 11 points et 8,3 points. Les crédits à long terme ont eu une contribution marginale de 0,3 point », détaille par ailleurs de document de la banque centrale sus-mentionné.

En d’autres termes, tout au long de l’année 2024, les volumes de crédits ont augmenté dans la Cemac sur tous les compartiments du marché. Le même phénomène a été observé en 2023, avec une augmentation des crédits à l’économie de 11,1% sur un an. Cette réalité interroge sur l’efficacité de la politique monétaire restrictive mise en place par la banque centrale entre fin 2021 et mars 2025, officiellement pour combattre l’inflation galopante dans la zone Cemac.

Relèvement des taux directeurs

En effet, en suspendant les opérations d’injection de liquidité dans les banques – elles ont été relancées en juin 2024 – en intensifiant les ponctions de la liquidité bancaire et en relevant ses principaux taux directeurs plusieurs fois à partir de la fin 2021 – ils ont été à nouveau baissés fin mars 2025 – la banque centrale des pays de la Cemac ambitionnait officiellement d’assécher les banques commerciales. Et restreindre ainsi l’accès au crédit par la hausse des taux d’intérêts.

Mais, à l’épreuve de la réalité, en plus des volumes de crédits qui ont progressé sur l’ensemble des années 2023 et 2024, les taux d’intérêts bancaires en zone Cemac ont par exemple décroché de 33 points en glissement annuel au 3è trimestre 2024. Ils sont passés de 9,78% à 9,45%, selon la BEAC. Ces deux faits traduisent clairement une non transmission des décisions de politique monétaire de la banque centrale au circuit économique réel.

Ruée vers le marché interbancaire

En effet, face au durcissement des conditions de refinancement par la banque centrale, les banques commerciales ont trouvé une autre parade. Elles ont développé le marché interbancaire – en se prêtant l’argent entre-elles en cas de besoin – grâce aux avantages qu’offre notamment la pension livrée sur le marché secondaire des titres publics de la BEAC.

La pension livrée est une technique de financement interbancaire caractérisée par un échange de titres négociables contre de la trésorerie, pour une période déterminée. Cette transaction exige la signature d’une convention-cadre entre les parties. La convention permet au prêteur de se voir automatiquement transférer la propriété des titres mis en garantie par l’emprunteur, une fois la date du remboursement de la créance échue. « On n’a même pas besoin d’aller devant un tribunal pour obtenir ce transfert de propriété », fait remarquer un habitué de ce type d’opération.

En raison de la sécurité et de la garantie de bonne fin des transactions qu’offre ce mécanisme de financement, la pension livrée a explosé dans la Cemac. Dans la mesure où elle permet aux banques commerciales d’accéder à la liquidité des confrères, et ainsi contourner la politique restrictive au guichet de la banque centrale. Entre 2023 et 2024 par exemple, les opérations de pension livrée ont augmenté dans la Cemac d’environ 4000 milliards de FCFA. Selon les données de la BEAC, elles sont passées de 5263,4 milliards de FCFA en 2023 à 9121,4 milliards de FCFA au 31 décembre 2024.

Brice R. Mbodiam

Lire aussi:




24-03-2025 - Le Cameroun et le Gabon raflent 80% des crédits octroyés par les banques de la Cemac à fin septembre 2024





21-02-2025 - Cemac : les crédits bancaires progressent de 10,6% au 3ᵉ trimestre 2024, grâce au secteur privé non financier

08-04-2025 - Marché secondaire de la BEAC : la pension livrée propulse les transactions à près de 21 500 milliards en 2024





Source link

View Kamer

FREE
VIEW