(Investir au Cameroun) – Un projet de loi déposé au Congrès américain porté par le républicain Bill Huizenga, propose de suspendre le soutien des États-Unis à toute initiative de financement du FMI concernant les pays membres de la Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale (Cemac), tant qu’une évaluation complète de leurs réserves de change brutes n’aura pas été réalisée.
Si le texte intitulé « Cemac Act » concerne les six pays de la sous-région — le Cameroun, le Gabon, le Tchad, le Congo, la Centrafrique et la Guinée équatoriale —, il interpelle avant tout le FMI sur sa responsabilité dans la gestion d’une partie des réserves de change de cet espace communautaire. L’attention se porte notamment sur les fonds destinés à la restauration du passif environnemental, versés par les compagnies pétrolières internationales (IOC).
En 2018, la Banque des États de l’Afrique Centrale (BEAC), banque centrale de la Cemac, a introduit une réglementation sur les réserves de change imposant aux entreprises extractives de constituer des fonds destinés à la réhabilitation des sites exploités. Elle a récemment fixé au 30 avril 2025 la date limite pour la signature de cet accord par les compagnies pétrolières internationales (IOC), sous peine de pénalités pouvant atteindre 150 % du montant du fonds de restauration à compter du 1er mai 2025.
La BEAC justifie sa démarche par la nécessité de reconstituer ses réserves de change et de préserver la stabilité extérieure de la sous-région, mise à mal par un niveau de couverture des importations tombé à seulement 4,8 mois en mars 2025, contre un seuil jugé confortable de cinq mois minimum selon le Fonds monétaire international (FMI).
La principale préoccupation du côté américain tient au refus de la BEAC de renoncer à son immunité souveraine en cas de défaillance dans la gestion des réserves, alors même qu’elle entend jouer le rôle de dépositaire. Les législateurs américains à l’origine du projet de loi jugent cette position arbitraire et reprochent au FMI son silence, estimant qu’il aurait dû clarifier cette question.
Dans leur volonté de défendre l’obligation faite aux entreprises américaines de rendre disponibles les fonds de restauration à la BEAC, les responsables américains s’appuient sur les manuels du FMI. Ceux-ci précisent que seules peuvent être considérées comme réserves de change les ressources « rapidement disponibles » et « effectivement contrôlées » par un pays. Or, selon eux, les fonds de restauration ne remplissent pas ces critères.
Les dernières données disponibles estiment les réserves de change de la Cemac à 7 584,9 milliards de FCFA, en légère amélioration par rapport à la fin de l’année 2024, selon des documents du FMI. Si ces chiffres peuvent paraître rassurants, le Fonds monétaire international reste néanmoins prudent. Dans une note récente, l’institution a recommandé à la BEAC de maintenir des taux d’intérêt élevés, afin de contenir les pressions inflationnistes persistantes dans la région.
Idriss Linge