Coup de théâtre après la présidentielle du 12 octobre 2025 : Issa Tchiroma Bakary, qui s’était autoproclamé vainqueur du scrutin, a trouvé refuge à Yola, dans l’État nigérian d’Adamawa.
Depuis plusieurs jours, l’ancien ministre vit en résidence surveillée, sous la vigilance de la National Intelligence Agency (NIA) du Nigeria.
Alors que Yaoundé reste silencieux, Abuja marche sur des œufs, redoutant une crise diplomatique.
Le Cameroun va-t-il demander son extradition, ou laisser la tension s’apaiser ?
De Garoua à Yola : la fuite d’un homme traqué
Selon des sources sécuritaires concordantes, Issa Tchiroma Bakary aurait quitté le Cameroun fin octobre, après s’être senti menacé à la suite de sa proclamation unilatérale de victoire.
Arrivé discrètement à Yola, il est hébergé par un proche soutien politique.
Mais très vite, les services secrets nigérians (NIA) l’ont localisé, interrogé sur ses intentions, et interdit toute communication publique.
Un agent nigérian confie sous anonymat :
« L’homme est calme, mais conscient qu’il est surveillé. Il n’a plus le droit de parler aux médias, ni de se déplacer sans autorisation. »
À Yola, sa présence divise. Certains voient en lui un homme courageux, d’autres un politicien en fuite qui joue avec le feu.
Une affaire qui embarrasse Abuja et Yaoundé
Pour le Nigeria, le dossier Tchiroma est explosif.
D’un côté, il s’agit d’un voisin influent et sensible, le Cameroun.
De l’autre, le souvenir de Sisiku Julius Ayuk Tabe, leader séparatiste anglophone extradé en 2018, plane encore sur les relations bilatérales.
Aucun mandat d’arrêt officiel n’a encore été émis par Yaoundé, mais selon plusieurs diplomates, une demande d’extradition serait déjà prête à être transmise.
Un proche du ministère camerounais des Relations extérieures explique :
« Le gouvernement veut éviter toute escalade, mais il ne peut tolérer qu’un ressortissant se déclare président depuis l’étranger. »
Cette situation inédite met Abuja dans une posture délicate : coopérer avec Yaoundé sans donner l’impression d’agir sous pression politique.
Les réseaux de Tchiroma au Nigeria
Issa Tchiroma n’est pas un inconnu à Yola.
Originaire du Nord-Cameroun, il entretient depuis des années des liens étroits avec des cercles religieux et politiques nigérians, notamment avec l’émir de Kano, Muhammadu Sanusi II.
Ces connexions pourraient aujourd’hui peser dans le bras de fer en cours.
Un observateur local note :
« Tchiroma a toujours eu un pied de chaque côté de la frontière. Il connaît bien les codes, les élites et les alliances régionales. C’est ce qui le rend difficile à manœuvrer pour les deux États. »
Pour le moment, aucun signe d’exfiltration n’est envisagé, mais la tension reste palpable entre les deux capitales.
Entre asile officieux et exil stratégique, Issa Tchiroma joue une partie à haut risque.
Ni Yaoundé ni Abuja ne souhaitent raviver une crise, mais chacun guette le faux pas de l’autre.
Le Cameroun, déjà en pleine recomposition politique, saura-t-il gérer ce nouveau casse-tête sans froisser son puissant voisin ?
👉 Le retour ou l’extradition de Tchiroma pourrait bien devenir l’un des dossiers les plus sensibles de l’après-présidentielle.

