View Kamer

Cameroun : ces facteurs qui pourraient entraîner l’échec du plan gouvernemental d’import-substitution


Le gouvernement camerounais prévoit un budget prévisionnel de 1 371,5 milliards de Fcfa pour réaliser son Plan intégré d’import-substitution agropastoral et halieutique (Piisah) sur la période 2024-2026. Rendu au deuxième trimestre 2024, il n’existe pas de données permettant d’évaluer le niveau d’avancement réel du projet gouvernemental annoncé par le chef de l’Etat le 31 décembre 2023. Toutefois, Paul Biya a indiqué que ce plan devrait renforcer la « souveraineté alimentaire », réduire l’impact négatif des importations qui entraînent un déficit de la balance commerciale estimé à 1 500 milliards de Fcfa chaque année. Si l’on peut d’ores et déjà afficher un brin d’optimisme, la réussite du Piisah reste tout de même conditionnée par l’accomplissement d’un certain nombre de préalables qui auraient dû être réglés plus tôt.

Lire aussi : Cameroun : l’Etat veut créer un fonds de soutien de 150 milliards de Fcfa pour son plan d’import-substitution

Contrats de performance

Le premier constat est le manque de compétitivité des entreprises du secteur agropastoral en raison de l’absence d’une feuille de route rigoureuse. D’où la nécessité comme le relève le Piisah, d’instaurer systématiquement les contrats de performance  au sein de structures publiques de production, de transformation et de commercialisation (CDC, Pamol Plantations, Semry, Unvda, Office Céréalier, Mirap, ect.). L’objectif étant d’améliorer leur rendement et réduire les subventions allouées par l’Etat.

En l’absence des contrats de performance, la Commission technique de réhabilitation des entreprises du secteur public et parapublic (CTR) dans son rapport de 2022 renseigne qu’« avec un résultat net cumulé de -11,9 milliards de Fcfa, il ressort que toutes les entreprises enregistrent des résultats négatifs, à l’exception de la Sodecoton et de la Semry ».  Il est évident qu’un tel rendement au cours des années d’implémentation du projet supra mentionné, n’aurait qu’un impact négatif alors que des financements sont déjà programmés pour subventionner lesdites entreprises. Pour inverser la tendance, le plan de relance des filières agropastorales suggère de placer sous contrats de performance les entreprises du domaine à partir de 2025. Dans une circulaire signée le 5 juillet 2022, le ministre des Finances Louis Paul Motaze annonçait la matérialisation du processus dès le 1er janvier 2023 jusqu’au 31 décembre 2024 soit deux ans d’implémentation.

Lire aussi : Cameroun : le gouvernement a besoin de 1 371,5 milliards pour réaliser le plan triennal d’import-substitution intégré

Problème foncier

S’il ne trouve pas de solution concrète, le problème foncier pourrait être un autre handicap au Plan triennal d’import-substitution. Pourtant, c’est un facteur de production incontournable aussi bien pour l’agriculture, la pêche que l’élevage. L’enquête sur le climat des affaires dans le secteur industriel publié en 2023 montre que le gouvernement a encore du chemin à faire. A croire le document conçu par le ministère de l’Economie, 76% des hommes d’affaires trouvent l’accès aux terres difficile même si le ministère des Domaines, du Cadastre et des affaires foncières (Mindcaf) réplique que des réserves foncières sont mises à la disposition des investisseurs sur le triangle national.  

Lire aussi : Import-substitution : le Cameroun a besoin de 218 milliards de Fcfa pour désenclaver les bassins agricoles

De plus, déplorent les experts du Piisah, l’accroissement de plus 200% de la redevance foncière dans la loi des finances 2023, semble décourager de nombreux promoteurs agricoles et d’élevage. D’où la proposition de réviser cette disposition en 2024. Au Mindcaf, on renseigne que « ces tarifs étaient aussi insignifiants. Ils avaient été fixés à l’époque de l’élaboration de la loi foncière et vu la conjoncture, ils nécessitaient une actualisation.  En marge de la Cameroon Investment Forum le 17 avril 2024, les acteurs du secteur privé ont insisté sur la question du titre foncier. « Pour produire localement du riz, du maïs, du poisson, du lait et de l’huile de palme, nous avons besoin d’espace, de terrain. Le problème foncier est bien connu au Cameroun. Actuellement, le titre foncier ne garantit rien car il peut être révoqué par le ministre du jour au lendemain. Comment envisager de développer l’agriculture si le titre foncier, qui est l’outil fondamental, n’offre aucune sécurité ? », s’est interrogé le patronat.

Eternelle difficulté d’accès aux financements

Le Piisah fait beaucoup de promesses de financement pour les trois prochaines années. Mais en attendant, l’enquête sur le climat des affaires dans le secteur industriel fait savoir que 59% des chefs d’entreprises du secteur industriel trouvent contraignantes les conditionnalités imposées par les banques contre seulement 11% d’entre eux qui les jugent acceptables. Pour ce qui est des subventions, « 91% des chefs d’entreprises pensent que l’appui financier reste insuffisant » même si « 61% d’entre eux n’ont pas connaissance de ces mesures et près de la moitié des chefs d’entreprises estiment que ces mesures ne sont pas appliquées » d’après la même source.

Lire aussi : Budget 2024 : le gouvernement prévoit allouer 127, 5 milliards à l’import-substitution (+10%)



Source link

View Kamer

FREE
VIEW