L’hypocrisie politique a rarement été aussi flagrante. Quelques semaines à peine après avoir sollicité du gouvernement camerounais une exonération douanière de 50 % pour l’importation de matériel photovoltaïque en provenance de Chine, la députée Nourane Foster, du PCRN, appelle désormais les Camerounais à respecter les “villes mortes”. « C’est une gifle au bon sens », souffle un haut fonctionnaire à Yaoundé. Comment comprendre qu’une élue ayant bénéficié de faveurs de l’État se retourne subitement contre lui ? Le double jeu de la députée fait grincer des dents jusque dans les rangs de son propre parti.
Une élue qui profite du système qu’elle critique
Le document officiel du Ministère des Finances, signé du ministre Louis Paul Motazé le 30 septembre 2025, est sans équivoque.
Dans une correspondance adressée à Nourane Foster, l’État accorde un abattement exceptionnel de 50 % des droits de douane sur cinq cents (500) kits d’éclairage photovoltaïque importés de Chine par son association “Solidarité 237”.
Cette faveur, obtenue « à titre exceptionnel » selon le courrier, visait à soutenir un projet de développement communautaire.
Mais à peine un mois plus tard, la même députée publie un message tonitruant :
« Je boycotterai la rentrée parlementaire pour écouter le peuple et soutenir la liberté d’expression. »
Une déclaration perçue comme un alignement politique opportuniste au moment où l’opposition relance l’idée des “villes mortes”, concept tristement associé aux crises économiques des années 1990.
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Du privilège au populisme : un virage politique déroutant
Les réactions ne se sont pas fait attendre. Dans les couloirs du Parlement, plusieurs députés dénoncent un comportement incohérent.
« Elle ne refuse pas les avantages du système, mais fait mine de s’opposer quand ça sert son image », glisse un collègue du Sud-Ouest.
Cette volte-face intervient alors que le PCRN, déjà fragilisé depuis la présidentielle du 12 octobre, tente de panser ses plaies internes.
Le parti, dirigé par Cabral Libii, avait reconnu la victoire de Paul Biya, tandis que Nourane Foster semble désormais jouer la carte de la contestation pour exister médiatiquement.
Dans les milieux diplomatiques, on s’interroge : peut-on être à la fois bénéficiaire de l’État et agitatrice contre lui ?
Certains observateurs parlent d’un « calcul politique cynique » visant à se repositionner comme figure rebelle, alors même qu’elle a profité des largesses de l’administration qu’elle prétend aujourd’hui combattre.
« Ce n’est pas du jeu. Quand on bénéficie de l’État, on le respecte, on ne crache pas dans la soupe », réagit un entrepreneur de Douala.
Une stratégie dangereuse pour la stabilité nationale
L’appel de Nourane Foster à soutenir les villes mortes alimente une tension déjà palpable dans plusieurs villes du pays.
Le mot d’ordre de désobéissance, relayé par Issa Tchiroma Bakary, inquiète les autorités locales et les opérateurs économiques.
À Douala et Yaoundé, des commerçants redoutent une paralysie de l’activité, rappelant les lourdes pertes enregistrées lors des mobilisations similaires dans les années 90.
« Ceux qui appellent à fermer les boutiques vivent dans le confort. Ce sont les petits vendeurs qui souffrent », martèle un jeune du marché Mboppi.
En rejoignant ce mouvement, la députée confirme une rupture totale avec la ligne républicaine et met en péril sa crédibilité institutionnelle.
Pour beaucoup, ce geste symbolise l’amertume d’une politicienne déçue qui, croyant sentir le vent tourner, cherche à se replacer du “bon côté de l’histoire”.
De l’avantage fiscal à la rébellion politique, le contraste est saisissant. Nourane Foster, hier partenaire du gouvernement, se mue aujourd’hui en militante anti-système.
Son revirement, jugé « opportuniste et dangereux », interroge sur les motivations réelles de certains acteurs politiques camerounais.
Reste une question : jusqu’où ira-t-elle dans ce double jeu avant que le peuple, qu’elle prétend défendre, ne découvre sa vraie face ?

