Coup de tonnerre sur la scène politique camerounaise. À la veille de la rentrée parlementaire du 3 novembre 2025, la députée du PCRN, Nourane Foster, a annoncé qu’elle boycottera la session à l’Assemblée nationale pour soutenir l’appel à la désobéissance civile lancé par Issa Tchiroma Bakary. Dans une publication qui fait déjà le tour des réseaux sociaux, elle déclare « écouter les cris du peuple ». Une élue de la République qui rejoint un mot d’ordre de villes mortes ? Ce geste inédit fait trembler les couloirs du pouvoir et secoue profondément la classe politique.
Une députée qui rompt avec la ligne officielle du PCRN
Le message publié par Nourane Foster ce dimanche 2 novembre a eu l’effet d’une bombe.
« Demain, 03 novembre, la rentrée parlementaire aura lieu sans moi, car j’ai décidé d’écouter les cris du peuple qui exige la liberté d’expression et le respect des opinions différentes », a-t-elle écrit sur son compte X (ex-Twitter).
En choisissant de boycotter la rentrée parlementaire, l’élue du Wouri prend clairement position en faveur de l’appel aux villes mortes lancé par Issa Tchiroma Bakary, leader du FSNC. Cette action est présentée par ses promoteurs comme une « journée de silence national » contre les arrestations arbitraires et les privations de liberté observées depuis la présidentielle contestée du 12 octobre.
Mais du côté du Parti Camerounais pour la Réconciliation Nationale (PCRN), cette sortie sonne comme un véritable affront. Le parti de Cabral Libii, déjà secoué par des divisions internes, avait officiellement reconnu la victoire de Paul Biya à la présidentielle. En rompant cette ligne, Nourane Foster s’isole politiquement tout en s’érigeant en figure de résistance symbolique.
« Elle veut se repositionner en héroïne populaire, mais c’est un pari dangereux », commente un analyste politique à Yaoundé.
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Les “villes mortes” : un appel à la contestation ou un risque économique ?
L’appel lancé par Issa Tchiroma Bakary et repris par plusieurs figures de l’opposition vise à paralyser le pays pour « forcer un sursaut national ». Les partisans du mouvement affirment vouloir « protester pacifiquement contre l’injustice et la répression ».
Mais pour beaucoup de Camerounais, le souvenir amer des années 1990 refait surface.
« On a déjà vécu ça ! Les villes mortes, c’était le chaos, la pauvreté et la peur. Ce n’est pas la solution », soupire un commerçant du marché Sandaga à Douala.
À Yaoundé, les autorités redoutent les conséquences économiques et sécuritaires d’un tel mot d’ordre. Des consignes de vigilance auraient été données aux préfets et gouverneurs pour éviter tout débordement. Plusieurs sources évoquent un renforcement discret des patrouilles dans les grandes métropoles.
En soutenant cet appel, Nourane Foster s’expose à de sérieuses sanctions politiques. D’après le règlement intérieur de l’Assemblée nationale, l’absence injustifiée à une session peut entraîner une procédure disciplinaire. Mais pour ses partisans, « elle incarne le courage d’une jeunesse qui en a marre du silence politique ».
« Elle ne trahit personne, elle parle pour le peuple », défend un jeune militant PCRN rencontré à Bafoussam.
Une fracture ouverte au sein du PCRN
Cette affaire met en lumière une crise profonde au sein du PCRN. Depuis la présidentielle, le parti est divisé entre deux camps :
- celui fidèle à Cabral Libii, qui prône la légalité institutionnelle ;
- et celui de Nourane Foster, plus radical, qui prône la “désobéissance citoyenne”.
Son absence annoncée à la session parlementaire du 3 novembre pourrait marquer un tournant décisif pour le parti, déjà affaibli par des rivalités internes.
Le silence de Cabral Libii depuis l’annonce laisse planer un doute : cherche-t-il à éviter la rupture ouverte ou prépare-t-il une mise à l’écart de sa collègue ?
Dans les réseaux sociaux, les internautes se déchirent. Certains saluent « une femme courageuse », d’autres dénoncent « une stratégie de chaos inutile ».
En appelant les Camerounais à respecter les villes mortes, Nourane Foster s’inscrit dans une démarche risquée, entre conviction et provocation.
Son geste relance un débat vieux de trente ans : jusqu’où peut aller la contestation politique sans menacer la stabilité nationale ?
Une chose est sûre : le 3 novembre 2025, la députée brillera par son absence… et son geste restera dans les annales.

