L’affaire qui oppose le milliardaire camerounais Baba Ahmadou Danpullo aux filiales de groupes sud-africains vient de connaître un nouveau rebondissement spectaculaire. Malgré une décision de justice ordonnant la levée de la saisie des avoirs de MTN Cameroun, l’homme d’affaires a immédiatement contre-attaqué en gelant à nouveau les comptes de l’opérateur téléphonique pour un montant encore plus élevé : 275,5 milliards de FCFA. Cette manœuvre juridique audacieuse illustre l’acharnement d’un des hommes les plus fortunés du pays dans ce conflit transfrontalier qui empoisonne désormais les relations entre Yaoundé et Pretoria.
La justice donne raison à MTN, Danpullo riposte instantanément
Le 24 février dernier, la Cour d’appel du Littoral a ordonné la levée de la mise sous séquestre des comptes de MTN Cameroun. Cette décision, qui semblait mettre fin à la saisie conservatoire de 144 milliards de FCFA prononcée en septembre 2022 par le tribunal de première instance de Douala-Bonanjo, constituait une victoire pour l’opérateur télécom sud-africain. Selon nos informations recueillies par 237online.com, la cour a motivé sa décision en soulignant “l’absence de relation d’affaires” entre les deux parties, estimant que Danpullo ne pouvait “se prévaloir d’une créance sur MTN Cameroun”.
Mais c’était sans compter sur la détermination du magnat camerounais. À peine deux jours après cette décision, ses avocats ont formellement donné mainlevée de la saisie initiale auprès des trois banques concernées (Citibank Cameroon, Standard Chartered Bank Cameroun et la BICEC), pour aussitôt procéder à une nouvelle saisie conservatoire, cette fois-ci pour un montant largement supérieur.
Des sommes astronomiques en jeu dans une bataille de représailles
Cette nouvelle offensive juridique porte sur 275,5 milliards de FCFA. Un montant qui inclut la réclamation principale de 200 milliards de FCFA, censée correspondre à l’évaluation des biens immobiliers que Danpullo estime avoir été injustement saisis en Afrique du Sud.
À cette somme déjà colossale s’ajoutent diverses pénalités : 21,6 milliards pour des “loyers échus indûment perçus”, 22,1 milliards au titre de frais de recouvrement, 23,7 milliards d’intérêts calculés sur trois ans au taux annuel de 3,25%, et plus de 8 milliards de “droit de recette”. Des chiffres qui donnent le vertige et témoignent de l’ampleur exceptionnelle de ce conflit commercial.
Un feuilleton juridique qui empoisonne les relations Cameroun-Afrique du Sud
Cette affaire trouve son origine dans les déboires financiers des sociétés immobilières de Danpullo en Afrique du Sud. En septembre 2021, la Haute Cour de justice sud-africaine avait placé en redressement judiciaire quatre entreprises appartenant au milliardaire camerounais : Joburg Skyscraper, Bestinver Prop, Bestinver SA et Leopont. Incapables de rembourser environ 550 millions de rands (près de 18,4 milliards de FCFA) à la First National Bank (FNB), ces sociétés ont vu leurs actifs liquidés.
En réaction, Danpullo a engagé des représailles au Cameroun contre des intérêts économiques sud-africains, ciblant particulièrement MTN Cameroun et Chococam (filiale de Tiger Brands). Une stratégie qui transforme un litige commercial en crise diplomatique larvée entre deux poids lourds économiques du continent.
Les interprétations de cette nouvelle offensive divergent radicalement selon les camps. L’entourage de Danpullo considère que rien n’a changé : les comptes de MTN demeurent gelés. De son côté, l’opérateur télécom s’apprête à exiger des banques la levée immédiate du blocage, fort de l’arrêt de la Cour d’appel qui, selon ses avocats, ne peut être suspendu par une simple manœuvre procédurale.
Une chose est certaine : ce feuilleton judiciaire, qui dure depuis plus de deux ans, est loin d’avoir livré son épilogue et continuera d’alimenter les chroniques économiques et juridiques au Cameroun comme en Afrique du Sud.
