Le dossier de l’assassinat de Marie Florence Kwadith prend une tournure alarmante. Cette ressortissante camerounaise naturalisée française, retrouvée morte sur l’axe Yaoundé-Nsimalen le 19 février 2023, fait l’objet d’une enquête qui suscite de graves interrogations. 237online.com a mené l’investigation et révèle aujourd’hui des éléments troublants qui remettent en question l’intégrité de notre système judiciaire.
Les preuves d’innocence ignorées, deux hommes sacrifiés
Depuis le 18 avril 2023, deux professionnels croupissent en prison dans l’affaire Kwadith. Un ingénieur en télécommunications et son chauffeur, arrêtés à Douala sous le simple prétexte que l’un d’eux aurait reçu un appel de la victime la veille du drame. Pourtant, leur innocence est soutenue par un faisceau de preuves irréfutables : tracés GPS du véhicule, rapports techniques de géolocalisation, témoignages, ordre de mission et planning de travail. Des éléments qui prouvent qu’ils se trouvaient à plusieurs kilomètres du lieu du crime cette nuit-là.
“Comment peut-on maintenir en détention des personnes dont l’alibi est aussi solide ?” s’interroge Me Kamdem, avocat consulté par notre rédaction. “Ce qui est encore plus troublant, c’est l’absence d’investigation sur les pistes les plus évidentes“, ajoute-t-il.
L’enquête détournée, les vrais suspects protégés ?
L’enquête révèle des manquements inexplicables. Quatre jours avant son décès, Madame Kwadith avait été transférée de son hôtel à Essos vers l’Hôtel des Députés, sur intervention directe du préfet de la Léki et réservation d’un député. Étrangement, ni l’un ni l’autre n’ont été entendus par les enquêteurs.
Plus troublant encore : le soir du crime, la victime était au téléphone avec son frère lorsqu’on a frappé à sa porte. Elle lui a signalé attendre une visite avant de raccrocher. Cette personne, dernière à l’avoir vue vivante, n’a jamais été recherchée. Quant aux vidéos de surveillance de l’hôtel, elles ont mystérieusement été déclarées “inexploitables”, malgré une décharge signée attestant de leur remise aux autorités.
Notre enquête a également révélé qu’un téléphone taché de sang, découvert près du corps par la gendarmerie de Bikok, a disparu des pièces à conviction. Les enquêteurs affirment l’avoir “restitué à son propriétaire” sans procès-verbal ni audition. Une procédure pour le moins inhabituelle dans une affaire d’homicide.
Justice bafouée, procès interminable
L’information judiciaire a duré 15 mois sans qu’aucune démarche sérieuse ne soit entreprise pour identifier les véritables responsables. Le procès, qui se tient au Tribunal de Grande Instance de Ngoumou, est marqué par des reports incessants. Depuis septembre 2024, six audiences ont eu lieu sans véritable avancée, la prochaine étant fixée au 20 mars 2025.
Cette situation soulève des questions fondamentales sur l’indépendance de notre justice. “Nous assistons à ce qui pourrait être une des plus graves erreurs judiciaires de ces dernières années au Cameroun“, nous confie une source proche du dossier.
Alors que deux hommes pourraient payer pour un crime qu’ils n’ont pas commis, les véritables coupables courent toujours.