(Investir au Cameroun) – Les recettes de Nachtigal Hydro Power Company (NHPC), l’exploitant du barrage de Nachtigal (420 MW), devraient progresser nettement au cours des prochaines années, selon un rapport du ministère des Finances. Elles sont projetées à 132 millions € en 2024 (86,5 milliards FCFA), puis à 207 millions € (135,7 milliards FCFA) en 2025 et 208 M€ (136,4 milliards FCFA) en 2026.
Le rapport ne détaille pas les déterminants de cette hausse, mais les revenus de NHPC proviennent exclusivement de la vente d’électricité à Eneo, son unique client. Depuis la mise en service progressive des sept turbines, NHPC facture 10 milliards FCFA par mois à l’énergéticien, que l’énergie produite soit entièrement consommée ou non. Ce mécanisme, prévu dans le contrat de concession négocié avec l’État du Cameroun, garantit à l’opérateur un niveau de recettes stable et prévisible, indépendamment des aléas hydrologiques ou de la demande. « En étiage, il y a le barrage réservoir de Lom Pangar en amont qui nous alimente en eau pour garantir un minimum de production », explique-t-on.
Malgré la montée en puissance technique de l’ouvrage, une partie de l’énergie disponible n’est toujours pas évacuée dans le réseau. Les retards dans la construction des lignes de transport, notamment celles reliant le poste de Nyom à Yaoundé, limitent aujourd’hui la capacité d’absorption d’Eneo. Pour optimiser l’accès et le transport de l’électricité, le gouvernement prévoit la construction d’un deuxième « corridor » de transport haute tension destiné à absorber de nouveaux volumes issus notamment du barrage de Nachtigal. Cette extension doit permettre de connecter de nouveaux clients industriels dès 2026, avec un potentiel de 150 MW supplémentaires, soit près de 50 Mds FCFA de revenus additionnels.
Une ligne de garantie bancaire pour sécuriser les paiements
Dans ce contexte, le ministère des Finances mène des négociations avec Société Générale Cameroun et plusieurs banques locales en vue de mettre en place une nouvelle garantie financière destinée à assurer le paiement régulier des factures dues à NHPC. Les documents consultés par Investir au Cameroun indiquent que l’opération porte sur une ligne de crédit revolving comprise entre 80 et 100 Mds FCFA.
Cette initiative intervient alors qu’Eneo traverse de graves tensions de trésorerie. Depuis février, l’entreprise ne parvient plus à respecter intégralement ses obligations contractuelles. Elle devait pourtant fournir une garantie bancaire couvrant le risque de non-paiement, adossée à une garantie souveraine. Faute d’accords de financement, Eneo n’a pas pu honorer cet engagement, poussant NHPC à activer la garantie détenue auprès de Société Générale Paris. Cette garantie initiale couvrait 86 M€ (environ 56 Mds FCFA), mais son taux de consommation dépasse désormais 85 %, avec moins de 10 M€ encore disponibles.
Un plan de redressement complet à l’horizon 2026
Après la renationalisation d’Eneo, le gouvernement prépare un plan de redressement complet à l’horizon 2026 : un diagnostic assorti d’un plan de restructuration d’ici février 2026, ainsi que la réorganisation de la dette sur la même période. Un mécanisme de recouvrement renforcé des factures publiques doit également entrer en vigueur d’ici 2026 afin d’alléger la pression financière sur l’électricien.
Selon le rapport Compact Energy Pays du ministère de l’Eau et de l’Énergie (Minee), Eneo Cameroun affichait fin 2024 un endettement global de 800 Mds FCFA, dont 500 Mds de dettes envers ses fournisseurs et 80 Mds de créances. Le Minee classe l’entreprise parmi les risques budgétaires majeurs pour l’État. Dans ses documents internes, Eneo est décrite comme « un facteur susceptible de provoquer un écart entre les prévisions et l’exécution budgétaire », en raison de la dégradation continue de sa situation financière et du risque élevé de cessation de paiement.
Amina Malloum
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