Plus de trente avocats camerounais ont lancé ce week-end un appel national à témoins, afin de recueillir des preuves liées aux arrestations, disparitions et violences survenues depuis l’élection présidentielle du 12 octobre 2025. L’initiative est coordonnée par Me Augustin Nguefack, avocat au barreau du Cameroun. « Nous avons la responsabilité morale de documenter ce qui s’est passé », déclare-t-il. L’objectif affiché : constituer des dossiers recevables devant les juridictions nationales et internationnales, y compris la Cour pénale internationale (CPI).
Mais cette démarche pourrait-elle réellement changer le cours des événements ?
Un collectif mobilisé pour documenter les témoignages
Le document rendu public annonce la mise en place d’un réseau d’avocats et de bénévoles chargé de recueillir :
- témoignages sous anonymat,
- preuves matérielles (photos, enregistrements, certificats médicaux),
- relats de familles et proches,
- ainsi que rapports d’ONG locales.
Selon Me Nguefack :
« Il ne s’agit pas d’accuser, mais de documenter de manière rigoureuse et juridiquement exploitable. »
Le collectif affirme agir dans le cadre :
- de la Déclaration universelle des droits de l’homme,
- de la Charte africaine des droits de l’homme,
- et du droit camerounais.
Ils précisent que les témoignages pourront être transmis de manière confidentielle à des avocats référents dans chaque région : Est, Littoral, Ouest, Nord, Sud et Extrême-Nord.
Contexte : tensions post-électorales et inquiétudes citoyennes
Depuis la proclamation de la victoire du président sortant, Yaoundé, Bafoussam, Douala et Maroua ont rapporté :
- interpellations ciblées,
- enlèvements signalés par des proches,
- détentions non confirmées officiellement,
- disparitions temporaires, parfois suivies de libérations discrètes.
Plusieurs organisations de défense des droits humains parlent d’une « répression systématique ».
Le gouvernement, lui, évoque des opérations de maintien de l’ordre face à des « troubles organisés ».
Dans les quartiers, la population s’interroge :
« Qui protège qui, exactement ? » souffle un habitant de Deïdo.
Quels sont les enjeux juridiques réels ?
La démarche du collectif pourrait :
- préserver la mémoire des faits,
- renforcer des procédures judiciaires futures,
- et alimenter des plaintes internationales.
Cependant :
- Les procédures devant la CPI sont longues,
- Les preuves doivent être extrêmement solides,
- Et les plaintes ne visent pas un État, mais des individus responsables.
Un professeur de droit à l’Université de Dschang résume :
« Le droit est une route lente. Mais une route qui avance. »
L’appel lancé par ce collectif d’avocats ouvre une nouvelle phase dans la crise post-électorale : celle de la traçabilité et de la mémoire.
Il reste maintenant à savoir si les témoins oseront parler.
Question aux lecteurs :
Ce mouvement peut-il réellement peser sur la justice, ou finira-t-il comme tant d’autres appels avant lui ?



