(Investir au Cameroun) – Le ministère des Finances (Minfi) mène des négociations avec Société Générale Cameroun et plusieurs établissements bancaires locaux afin de mettre en place une nouvelle garantie financière destinée à assurer le paiement régulier des factures dues à Nachtigal Hydro Power Company (NHPC), exploitant du barrage hydroélectrique de Nachtigal. Selon des documents consultés par Investir au Cameroun, l’opération porte sur une ligne de crédit revolving comprise entre 80 et 100 milliards de FCFA, arrangée par Société Générale Capital Securities Central Africa, chef de file du projet. Société Générale Cameroun figure parmi les prêteurs, aux côtés d’autres banques dont la participation est en cours de finalisation. « Le Minfi a récemment signé la convention avec Société Générale Cameroun, mais il manquait encore les signatures d’autres banques locales », précise une source proche du dossier.
Cette facilité, d’une durée de 24 mois, poursuit deux objectifs : régler les impayés d’Éneo envers NHPC dans le cadre du contrat d’achat d’électricité (PPA) signé en 2018, et renflouer la lettre de crédit stand-by (SBLC) émise par Société Générale sur instruction de l’État du Cameroun, en faveur de NHPC, pour un montant de 86 millions d’euros, soutenu par une garantie de la Banque mondiale.
Les discussions en cours viennent compléter la garantie souveraine déjà fournie par l’État auprès de Société Générale Paris. Cette garantie initiale couvrait 86 millions d’euros (environ 56 milliards de FCFA), mais son taux de consommation dépasse désormais 85 %, avec moins de 10 millions d’euros encore disponibles. « Pour le moment, la garantie n’est pas épuisée et il ne faut surtout pas qu’elle le soit, car elle est contre-garantie par la Banque mondiale », explique une source au fait du dossier.
Eneo sous pression
Depuis la mise en exploitation du barrage de Nachtigal — doté d’une capacité installée de 420 MW —, NHPC facture 10 milliards de FCFA par mois à Éneo, que l’énergie produite soit consommée ou non, conformément au contrat signé avec l’État. Mais les retards dans la construction des lignes de transport depuis le poste de Nyom et la réception partielle de la ligne d’évacuation vers Yaoundé limitent pour l’instant l’absorption de toute la production.
Confrontée à de graves tensions de trésorerie, Éneo ne parvient plus à respecter pleinement ses obligations contractuelles depuis février. L’entreprise devait fournir une garantie bancaire pour couvrir le risque de non-paiement, complétée par une couverture souveraine. Faute d’accords de financement, Éneo n’a pas pu honorer cet engagement, poussant NHPC à activer la garantie détenue auprès de Société Générale Paris. À ce jour, les paiements effectués par Éneo couvrent moins de 50 % des factures mensuelles, selon des informations glanées par investir au Cameroun. Ces chiffres n’ont pas été confirmés par le concessionnaire de la distribution d’électricité qui n’a pas encore communiqué officiellement sur sa situation financière.
Pour éviter une rupture de financement du projet, le Minfi discute avec les banques locales de la mise en place d’une nouvelle facilité de garantie, afin de permettre à NHPC de continuer à percevoir ses paiements, même en cas de défaut de l’énergéticien. « Conscient des enjeux liés au rating du Cameroun et à la crédibilité financière de l’État, le Minfi cherche à maintenir la confiance des investisseurs et des bailleurs de fonds », souligne un responsable impliqué dans les pourparlers.
La situation d’Éneo reste préoccupante. Selon le rapport Compact Energy Pays du ministère de l’Eau et de l’Énergie (Minee), Eneo Cameroun affichait fin 2024 un endettement global de 800 milliards FCFA, dont 500 milliards de dettes envers ses fournisseurs et 80 milliards de créances. Le Minee la classe parmi les risques budgétaires majeurs pour l’État. Dans ses documents internes, l’entreprise est décrite comme « un facteur susceptible de provoquer un écart entre les prévisions et l’exécution budgétaire », en raison de la dégradation continue de sa situation financière et du risque élevé de cessation de paiement.
Amina Malloum
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