Contrefaçon de droit d’auteur : Orange Cameroun condamné à payer plus de 500 millions FCFA à l’artiste Ama Pierrot


(Investir au Cameroun) – Loin des caméras, la Cour d’appel du Littoral, siégeant à Douala, a condamné le 14 mai 2024 la société Orange Cameroun à verser plus de 500 millions de FCFA à l’artiste-musicien camerounais Ama Pierrot, de son vrai nom Ama Ngoa Marcel. La juridiction a reconnu la filiale locale du groupe français de télécommunications coupable de contrefaçon du droit d’auteur, après plus de dix ans de procédure judiciaire.

L’affaire débute en 2011 devant le tribunal correctionnel de Yaoundé – centre administratif, où Ama Pierrot poursuit Jean Michel Latute, alors directeur général d’Orange Cameroun. En 2017, le dossier est transféré au tribunal correctionnel de Douala Bonanjo, à la suite de la démission de ce dernier. L’artiste est défendu par le cabinet Dudieu Avocats et Me Carine Monthe.

Ama Pierrot reproche à l’entreprise d’avoir exploité, sans autorisation, son titre « Ingratitude », disque d’or et meilleure vente de l’année 2006, comme indicateur d’appel et sonnerie téléphonique sur le réseau Orange Cameroun, et ce à des fins commerciales et publicitaires entre 2006 et 2017. Selon les constats versés au dossier, cette utilisation aurait été réalisée sans son consentement, portant ainsi atteinte à son droit moral et à l’intégrité de l’œuvre.

Pour l’artiste, toute exploitation d’une œuvre musicale à des fins publicitaires nécessite l’autorisation expresse et écrite de l’auteur. La synchronisation d’une musique avec un message publicitaire constitue en elle-même une atteinte au droit moral, le respect dû à l’œuvre interdisant toute altération, quelle qu’en soit l’ampleur.

Le 9 février 2021, le tribunal correctionnel de Douala Bonanjo ordonne une expertise financière destinée à déterminer la différence entre une société contributrice et une autre dans ce contexte d’utilisation d’œuvre musicale, à identifier la méthode de calcul permettant d’évaluer le nombre de fois où la musique a été utilisée par un client et à estimer le préjudice subi. Deux experts sont désignés : l’un spécialisé en gestion de projets culturels et cinématographiques, l’autre en finance. Leur rapport chiffre le préjudice à 96 milliards de FCFA.

Sur la base de ce rapport, le 12 janvier 2023, le tribunal correctionnel de Douala Bonanjo condamne Orange Cameroun à verser 300 millions de FCFA à l’artiste. Les deux parties interjettent appel. Le 14 mai 2024, la Cour d’appel du Littoral porte le montant de l’indemnisation à 500 millions de FCFA. Contacté par Investir au Cameroun, Stéphane Moukouri, chargé des relations publiques et de la presse chez Orange Cameroun, indique vouloir se référer à sa hiérarchie, mais aucune réaction officielle ne sera transmise au média.

Selon les informations obtenues par Investir au Cameroun, Orange Cameroun a introduit un pourvoi en cassation auprès de la Cour suprême. Approchée pour avoir plus de détails sur cette affaire, les avocats de l’artiste, Me Christian Dudieu Djomga et Me Carine Monthe, ont déclaré : « l’affaire étant encore pendante devant la Cour Suprême, nous n’entendons pas communiquer pour l’instant ».

Cette affaire, qui mêle droit d’auteur, exploitation commerciale et image de marque, pourrait constituer un précédent judiciaire majeur pour la protection des artistes au Cameroun si la Cour suprême venait à confirmer la décision.

Frédéric Nonos





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