(Investir au Cameroun) – Le 8 juillet 2025, le ministre de l’Élevage, des Pêches et des Industries animales, Dr Taïga, a inauguré à Bamendjou, dans la région de l’Ouest, la Ferme coopérative du Cameroun (FCC). Ce complexe agro-industriel d’un coût de 6 milliards FCFA a été initié par Dr Pascal Talla, un chirurgien camerounais installé en Suisse, qui répond ainsi à l’appel du chef de l’État invitant la diaspora à investir dans les secteurs productifs.
L’exploitation repose sur deux bâtiments de production pour un cheptel de 80 000 pondeuses, permettant une production quotidienne de 75 000 œufs. Elle intègre également une unité de fabrication d’aliments autonomisée (4 tonnes par heure), une poussinière de 40 000 têtes, une unité d’abattage de poulets, ainsi qu’une usine satellite à Bamena dédiée à la fabrication d’alvéoles.
Réduction des coûts
Pensée comme un projet intégré, la FCC vise à réduire la dépendance du secteur avicole aux importations d’intrants et à mieux résister aux hausses de prix. La ferme ambitionne aussi de renforcer les capacités des producteurs locaux, en approvisionnant le marché en poussins et aliments de qualité.
« Nous avons choisi ce secteur parce qu’il soutient à la fois l’agriculture, le marché local et la sécurité alimentaire », a déclaré Dr Pascal Talla, soulignant la vocation sociale et économique du projet.
Cette ferme a pu bénéficier du dispositif de la loi de 2013 (révisée en 2017) sur les incitations à l’investissement privé, qui prévoit des exonérations fiscales et douanières pour les projets jugés stratégiques.
Selon le ministre Taïga, cette initiative s’inscrit pleinement dans la politique d’import-substitution du gouvernement. « Cette unité va davantage renforcer l’autonomie de notre filière avicole. Tout ce que nous consommons est désormais produit localement », a-t-il déclaré.
Avec la montée en puissance de la demande en produits avicoles, ce type d’unité intégrée pourrait aider à stabiliser le marché, souvent exposé à la volatilité des prix en raison des pénuries d’aliments, des poussins ou des maladies comme la grippe aviaire.
Des précédents qui incitent à la prudence
Si cette ferme de Bamendjou suscite de l’enthousiasme, l’histoire récente invite à la prudence. En 2011, la Société des produits avicoles du Cameroun (SPAC) avait investi 5 milliards FCFA dans une usine d’abattage à Bafang. Quelques mois seulement après son lancement, elle faisait faillite. En cause : des coûts de production insoutenables, selon les explications données au Parlement en 2022 par le ministre des Finances.
La réussite de la FCC dépendra donc de sa capacité à rester compétitive, à assurer des débouchés stables et à maîtriser ses charges, dans un environnement parfois imprévisible.
Malgré les chocs répétés liés aux épizooties de grippe aviaire, la filière avicole camerounaise a montré une certaine résilience. D’après les données de l’Institut national de la statistique (INS), la production de poulets de chair a progressé de 18 % en 2021, atteignant 52 600 tonnes. Elle représente aujourd’hui 19 % de l’offre totale de viande au Cameroun, ce qui en fait la deuxième source d’approvisionnement en protéines animales.
L’arrivée de projets structurants comme la FCC pourrait renforcer cette dynamique, à condition d’éviter les erreurs du passé et de bâtir des modèles durables, soutenus par des filières organisées et compétitives.
Frédéric Nonos
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