(Investir au Cameroun) – Fitch Ratings indique que le Cameroun progresse vers une dette publique soutenable, grâce à une croissance économique projetée à 3,9 % en 2025 et 4,1 % en 2026. Cette expansion du PIB, tirée par l’agriculture, la construction et des projets d’infrastructure comme la centrale hydroélectrique de Nachtigal et l’extension du port de Kribi, contribue à réduire le ratio dette/PIB, un indicateur clé de la santé budgétaire. Selon la Caisse autonome d’amortissement (CAA), l’encours de la dette publique s’élevait à 14 442 milliards FCFA (44,7 % du PIB) en mars 2025, en hausse de 5,7 % sur un an, mais demeurait en deçà du plafond de 50 % fixé par la Stratégie d’endettement à moyen terme.
La structure de la dette reflète une gestion relativement prudente. La dette directe de l’administration centrale, estimée à 13 405 milliards FCFA (41,5 % du PIB), est composée à 63,8 % de dette extérieure et à 36,2 % de dette intérieure. Les maturités moyennes sont de 9,1 ans pour la dette extérieure et de 3,8 ans pour la dette intérieure, ce qui limite les risques de refinancement à court terme. Le taux d’intérêt moyen pondéré s’élève à 3,0 %, avec 2,6 % pour la dette extérieure et 3,3 % pour la dette intérieure, traduisant des conditions d’emprunt modérées.
Fitch projette un déficit budgétaire de 1 % du PIB en 2025 et 2026, contre 1,4 % en 2024. Le budget 2025, arrêté à 7 317,7 milliards FCFA, marque toutefois une augmentation significative, portée notamment par une enveloppe d’investissement public de 1 863,1 milliards FCFA, en hausse de 16,1 % par rapport à 2024. Cette expansion budgétaire accroît les tensions de trésorerie, comme l’indiquent les restes à payer (RAP) supérieurs à trois mois, estimés à 412 milliards FCFA en mars 2025, contre 441 milliards un an plus tôt, selon la CAA.
Malgré cette trajectoire favorable, Fitch maintient la note B du Cameroun avec une perspective négative. L’agence évoque les incertitudes politiques liées à l’élection présidentielle d’octobre 2025, perçue comme sensible en raison du flou sur la succession. Elle relève aussi des retards mineurs dans le règlement de certaines créances commerciales internationales, bien que réglés dans les délais de grâce. Les autorités attribuent ces retards à des difficultés techniques et affirment avoir engagé des réformes pour améliorer la gestion de la liquidité.
Les bailleurs de fonds internationaux restent vigilants. La Banque mondiale a reporté à début 2025 un financement de 200 millions USD (120 milliards FCFA), initialement attendu en 2024, en le conditionnant à des réformes structurelles complexes. De même, le FMI a différé un décaissement de 73,5 millions USD prévu en mars 2025 dans le cadre de la Facilité élargie de crédit (FEC) et du Mécanisme élargi de crédit (MEC), en vue de renforcer la discipline budgétaire dans la zone Cemac.
Le soutien international reste toutefois crucial. En mars 2025, le FMI a finalement débloqué 73,5 millions USD, portant le total des ressources mobilisées à 718,1 millions USD (425 milliards FCFA). À cela s’ajoutent 45,9 millions USD provenant de la Facilité pour la résilience et la durabilité (FRD), portant le total à 91,3 millions USD (54 milliards FCFA). Ces financements visent à soutenir la relance économique et la transition écologique, sous réserve de réformes fiscales, financières et de lutte contre la corruption.
Enfin, les efforts internes de mobilisation fiscale progressent. Selon la CAA, les recettes ont été dynamiques au premier trimestre 2025, notamment la TVA intérieure et les droits d’accises. Lors des Rencontres économiques du Cameroun en mars 2025, les priorités affichées portaient sur la réforme fiscale, la promotion de l’agribusiness et la diversification énergétique. Ces axes stratégiques visent à renforcer l’autonomie des collectivités territoriales et à consolider la trajectoire vers une soutenabilité budgétaire durable.
Idriss Linge