Une avancée majeure vient d’être enregistrée dans l’affaire qui bouleverse le Cameroun depuis plusieurs jours. Vingt personnes soupçonnées d’avoir participé à l’assassinat barbare de deux chercheurs et leur guide dans l’Extrême-Nord ont été interpellées mardi 11 mars. Cette vague d’arrestations intervient alors que l’exhumation des corps des victimes a été autorisée et programmée pour ce vendredi 14 mars, marquant un tournant décisif dans cette tragédie qui a provoqué une onde de choc nationale.
Vingt suspects sous les verrous pour un triple assassinat qui indigne la nation
L’audition des suspects se poursuit activement dans les locaux de la compagnie de gendarmerie de Mokolo. Ces interpellations représentent une étape cruciale dans l’éclaircissement des circonstances de la mort de Frédéric Mounsi et Bienvenue Bello, deux chercheurs de l’Institut de recherche géologique et minière de Garoua, ainsi que de leur guide, Oumarou Kabalay. Les trois hommes avaient été sauvagement assassinés le 2 mars dans le village de Mbalda, situé dans l’arrondissement de Soulédé-Roua.
Selon les témoignages recueillis, les victimes auraient été confondues avec des membres du groupe terroriste Boko Haram, une méprise tragique qui a conduit à leur lynchage.
Un brillant journaliste-chercheur fauché en pleine mission scientifique
Parmi les victimes, Frédéric Mounsi, 33 ans, incarnait une double vocation de journaliste et de chercheur. Attaché de recherche à l’Institut de Recherches Géologiques et Minières (IRGM) depuis 2019 et promu chargé de recherche en 2022, il poursuivait parallèlement un doctorat en géologie à l’Université de Maroua. Sa présence à Soulédé-Roua était directement liée à ses travaux de thèse, avec l’ambition louable de “résoudre la problématique de l’eau à l’Extrême-Nord”.
Sa carrière journalistique, débutée au Club Communication de l’Université de Ngaoundéré en 2013, s’était poursuivie à la radio Campus avant de l’amener à collaborer avec La Voix des Jeunes, où il avait occupé le poste de rédacteur en chef pendant deux ans. Après son affectation à Garoua en 2022, il était resté activement impliqué dans la presse catholique locale, démontrant un engagement sans faille pour la communication et l’information.
Ce parcours exceptionnel, brutalement interrompu, suscite une émotion particulière dans le milieu médiatique, comme en témoignent les nombreuses réactions recueillies par notre rédaction ces derniers jours.
L’exhumation des corps pour établir la vérité sur les circonstances du drame
Dans un développement significatif, les autorités locales ont autorisé l’exhumation des dépouilles des trois victimes, conformément aux souhaits exprimés par leurs familles qui ont dénoncé la précipitation avec laquelle les corps avaient été inhumés. Cette opération, prévue pour vendredi 14 mars, permettra aux familles de récupérer les corps dans des cercueils scellés pour procéder à des funérailles dignes.
La question de l’autopsie reste centrale pour les avocats des familles, qui attendent la délivrance de certificats médicaux légaux immédiatement après l’examen des corps. Par ailleurs, les élites du canton de Lara, dont était originaire Bienvenue Bello, exigent une enquête indépendante, des mesures d’apaisement et une indemnisation pour les proches des victimes.
Le ministère de la Recherche scientifique a quant à lui précisé que les chercheurs se trouvaient à Soulédé-Roua pour effectuer des recherches visant à résoudre le problème d’accès à l’eau potable dans les monts Mandara. Dans un communiqué officiel, il a fermement dénoncé une “tuerie barbare” et appelé à ce que “justice soit rendue”.
Face aux risques de tensions communautaires que ce drame pourrait engendrer, les autorités de l’Extrême-Nord ont lancé un appel à la retenue, exhortant les populations à ne pas céder à la tentation de la vengeance. Une sagesse qui sera nécessaire pour permettre à la justice de suivre sereinement son cours dans cette affaire qui a profondément choqué la nation camerounaise.