Le Cameroun continue de s’illustrer tristement comme l’un des pays les plus hostiles envers les minorités sexuelles. Le cas de Noubissi Sylvianne, 42 ans, commerçante établie à Douala, illustre l’intensité de la répression orchestrée par les autorités locales et la société camerounaise. Un mandat de recherche, émis le 30 décembre 2024 par la Division Régionale de la Police Judiciaire du Littoral, l’accuse d’« apologie et pratique de l’homosexualité », exposant ainsi sa vie à un danger imminent.
Une vie familiale détruite par le rejet
La révélation de son orientation sexuelle a eu des conséquences tragiques sur sa vie personnelle. Son mari, se sentant trahi, a quitté précipitamment le Cameroun avec leurs enfants pour se réfugier au Nigeria. « Il ne voulait pas que les enfants subissent la honte ou les représailles », confie un membre de la famille. Son père, notable respecté de leur région, l’a publiquement reniée sous la pression des communautés locales.
Sa petite sœur et ses neveux, restés au Cameroun, vivent dans la clandestinité, constamment harcelés et contraints de changer de résidence pour échapper aux menaces. Ces actes de représailles démontrent que l’impact de la persécution dépasse largement la personne de Sylvianne et touche l’ensemble de son entourage.
Persécutions systématiques et violences répétées
La descente aux enfers de Sylvianne a commencé avec l’incendie criminel de son commerce, une cave à Douala, qui a été totalement détruite. Les menaces ne se sont pas arrêtées là : des graffitis de menaces de mort ont été inscrits sur les murs de sa maison, l’isolant socialement et économiquement.


En juillet 2024, un incident glaçant s’est produit lors d’une messe dominicale. Un prêtre, au cours de son sermon, a pointé Sylvianne du doigt en la qualifiant de « suppôt de Satan », déclenchant une violente attaque des fidèles. Elle a échappé de peu à un lynchage en s’enfuyant sous une pluie de pierres.
Un autre épisode traumatisant a eu lieu en janvier 2023 lorsqu’une tentative de lynchage a éclaté au marché central de Douala, initiée par une commerçante l’ayant reconnue. Malgré l’intervention de policiers, ces derniers l’ont ensuite menacée de représailles, confirmant l’absence totale de protection institutionnelle.
Un passé marqué par la violence et la peur
Le sort de Sylvianne n’est pas un cas isolé. Elle a déjà été témoin, en 2022, de la disparition tragique de l’une de ses amies, traquée et brutalement assassinée pour son orientation sexuelle. « Chaque jour, je vis avec le souvenir de sa mort et la peur que cela m’arrive », confie Sylvianne.
Un exil forcé et salvateur
Consciente que rester au Cameroun équivalait à une condamnation à mort, Sylvianne a pris la décision déchirante de fuir , elle vit avec la peur constante que son statut de réfugiée ne soit pas reconnu, ce qui la renverrait inévitablement à un avenir de persécutions, voire de mort.
Les risques d’un retour au Cameroun
Un éventuel retour de Sylvianne au Cameroun l’exposerait aux conséquences suivantes :
• Une peine de prison de 5 ans, conformément à l’article 347-1 du Code pénal.
• Des violences systématiques, tant de la part des forces de l’ordre que de la population.
• Des menaces de mort de groupes extrémistes, encouragées par la stigmatisation sociale.
• Une impossibilité de se réinsérer économiquement ou socialement.
• Un risque élevé de lynchage public, comme en témoignent ses expériences passées.
Un plaidoyer pour la justice et les droits humains
Le cas de Sylvianne illustre la répression brutale que subissent les minorités sexuelles au Cameroun. Des figures de défense des droits humains, telles que Me Alice Nkom, avocate engagée, dénoncent courageusement cette persécution. « Comment peut-on encore traquer des citoyens pour leur orientation sexuelle en 2025 ? », s’insurge Me Nkom, malgré les nombreuses menaces qui pèsent sur elle.
Un appel à l’asile
Sylvianne a tout perdu : sa famille, son foyer, son commerce, et sa dignité dans son propre pays. Aujourd’hui, elle cherche protection et dignité en France, un pays dont les valeurs fondamentales reposent sur la liberté, l’égalité et les droits humains. Son retour au Cameroun serait un arrêt de mort. En tant que victime de persécutions institutionnelles et sociales, elle plaide pour une reconnaissance officielle de son statut de réfugiée afin de reconstruire sa vie en sécurité.