Dans une analyse percutante relayée par 237online.com, le Dr Louis-Marie Kakdeu, éminent politologue et Deuxième Vice-Président National du SDF, dresse un constat glaçant de la situation au Cameroun. Son diagnostic sans concession révèle comment le pays s’est progressivement transformé en ce que les experts qualifient d’« État malfaiteur ».
Les rouages d’une machine étatique dévoyée
Le concept de « criminalisation de l’État », théorisé par des chercheurs de renom comme Jean-François Bayart, prend une dimension particulièrement inquiétante dans le contexte camerounais actuel. Selon l’analyse de Kakdeu, cette dérive se manifeste à travers « la situation d’un État où les tenants du pouvoir utilisent le faux et le crime (politique, social, culturel ou économique) comme mécanisme de gouvernement ».
Les manifestations de cette criminalisation sont multiples et profondément ancrées dans l’appareil d’État. L’expert cite notamment « les fraudes et trafics en grandeur nature, l’exploitation sauvage des ressources naturelles, le pillage de l’économie, la privatisation des institutions publiques, la multiplication des milices armées, l’extension de la guerre ».
Un système répressif qui menace les citoyens
La situation sécuritaire est particulièrement préoccupante. Le pays traverse une crise sans précédent. Kakdeu révèle qu’« en 2024, 6 régions sur 10 sont en situation d’insécurité préoccupante et 3 régions sont en situation de guerre ».
L’autorité publique elle-même participe à cette dérive, comme en témoignent plusieurs incidents récents. L’auteur rapporte le cas troublant d’« un sous-préfet qui a demandé sans conséquence à ce jour ‘d’abattre’ un individu en pleine République au nom du maintien de l’ordre ». Plus inquiétant encore, il cite « le préfet du Mfoundi qui a même menacé toujours sans conséquence de déchéance de résidence ou de déportation des opposants hors de la capitale Yaoundé ».
La corruption institutionnalisée atteint des sommets, comme l’illustre cette anecdote édifiante : « Devant la Représentation nationale, le ministre des finances qui était appelé à dire quels étaient les critères pour bénéficier des chapitres 94 et 65, avait répondu : ‘Demandez, on vous donnera ; frappez, on vous ouvrira !’ ».
L’affaire Martinez Zogo est venue confirmer ces dérives, révélant un pays où « les forces de l’ordre supposées lutter contre le crime sont utilisées plutôt pour commettre des crimes ». Plus grave encore, « la torture, la sodomie, la soumission forcée, l’humiliation, etc., sont au cœur des pratiques du pouvoir ».
Face à cette situation alarmante, Kakdeu lance un appel urgent : « Le rapport des forces sera toujours en faveur des forces du mal si une plus grande mobilisation des camerounais, où qu’ils soient, n’est pas attestée pour renverser la vapeur ». Il conclut par un avertissement solennel : « C’est maintenant ou jamais ! »
Cette analyse implacable met en lumière l’urgence d’une réaction citoyenne face à un État devenu, selon les mots de l’expert, « un malfaiteur : ce sont ceux qui sont censés vous protéger qui représentent une menace pour votre vie ».