(Investir au Cameroun) – Au cours des cinq années allant de 2020 à 2024, les directeurs généraux (DG), directeurs généraux adjoints (DGA) et présidents de conseils d’administration (PCA) des entreprises et établissements publics du Cameroun ont perçu des rémunérations totalisant 48,4 milliards de FCFA. Sur cette enveloppe, obtenue selon la grille prescrite par le décret du 19 juin 2019 fixant les catégories, la rémunération, les indemnités et avantages des dirigeants des entreprises et établissements publics au Cameroun, environ 37 milliards de FCFA ont été versés à des dirigeants dont les entités présentent des performances peu éloquentes ou carrément négatives.
Telle est la quintessence d’un document intitulé « Combien l’État mobilise-t-il pour la rémunération des dirigeants des entités publiques ? », que vient de publier l’universitaire camerounaise et spécialiste des questions de gouvernance et de management, Viviane Ondoua Biwolé. « L’État dépense inutilement en payant les salaires des dirigeants sociaux contre-performants, car, ayant dégradé la valeur des entreprises (caractérisées par la baisse de la catégorie), et ceux qui sont peu performants, avec les entreprises qui ont stagné », soutient-elle.
En effet, comme grille d’analyse de la performance des 112 entreprises de son échantillon, l’ancienne directrice générale adjointe de l’Institut supérieur de management public (ISMP) s’appuie sur l’arrêté du ministre des Finances du 1er janvier 2023, portant catégorisation des entreprises et établissements publics du Cameroun. « Le classement de 2023 récompense la performance ou la sanctionne, à travers le reclassement des entités publiques tenant compte de la moyenne du chiffre d’affaires produit pendant 3 ans, de 2020 à 2022. Cette sanction se répercute dans la rémunération des dirigeants (DG, DGA et PCA). Au total, 37 entreprises et 75 établissements publics sont concernés », souligne-t-elle.
43 PCA hors-la-loi
Sur la base de ce document officiel, la consultante internationale révèle qu’en ce qui concerne les entreprises publiques, seulement trois (03) ont amélioré leurs performances, quatre (04) ont consolidé leur place en catégorie 1, tandis que respectivement 21 et six (06) entreprises ont stagné ou régressé. « Il ressort de ce qui précède que les dirigeants d’entreprises en stagnation et régression coûtent plus cher à l’État, sans véritablement produire la valeur attendue de manière importante, soit un montant global de 16,1 milliards de FCFA, contre 2,2 milliards de FCFA pour les dirigeants dont l’action permet de créer de la valeur », observe l’universitaire.
Le même constat est fait en ce qui concerne les 75 établissements publics de l’échantillon. Ici, apprend-on, les dirigeants des six (06) entités en régression et des 63 en stagnation ont perçu une rémunération globale de 20,8 milliards de FCFA entre 2020 et 2024, contre un peu plus d’un milliard de FCFA seulement pour ceux des trois (03) entités ayant permis de créer de la valeur.
Par ailleurs, dans son document d’analyse, la promotrice du cabinet OBIV Solutions souligne qu’au Cameroun, 43 PCA continuent d’exercer leurs fonctions en violation de la législation en vigueur. « En dépit de cette irrégularité, ces PCA ont perçu de manière indue une somme conséquente s’élevant à un total de 634 millions de FCFA. (…) Cette situation met en lumière des dysfonctionnements majeurs en matière de gouvernance et d’application des réformes initiées par les autorités » camerounaises, conclut-elle.
Brice R. Mbodiam
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