Après l’enceinte portuaire de Douala, un voyage de presse effectué la semaine dernière, de Yaoundé – Bangui – Ndjamena, dans le cadre d’une enquête menée par l’Institut sous-régional de la statistique et d’économie appliquées ( ISSEA), a permis aux hommes et femmes de médias, de toucher du doigt, les réalités du trafic sur ces principaux corridors de la sous-région Afrique centrale.
Douala – Bangui, des pots de vins persistants
D’après l’observation des journalistes lors du parcours des corridors Yaoundé (Cameroun) – Bangui (République Centrafricaine) – Ndjamena (Tchad), les camionneurs se réjouissent de la baisse drastique du nombre de contrôles routiers sur les corridors. Ceux-ci n’hésitent d’ailleurs pas à remercier les différents gouvernements de la sous-région, pour cette mesure salutaire qui selon eux, a contribué à la baisse significative des tracasseries policières, donnant ainsi plus de fluidité à la circulation des personnes et des biens dans la sous-région Afrique centrale. Ente Douala et Bangui (1394 km), le nombre de contrôles routiers a considérablement diminué. Fait marquant, il n’existe que quatre ou cinq contrôles routiers entre Garoua – Boulai et Bangui (594 km).
De l’aveu d’un camionneur au poste frontière de Garoua-Boulai, « Il y avait 09 ou 10 postes de contrôles avant, mais depuis qu’on a crié que c’est trop beaucoup et que cela nous empêche de circuler facilement, il reste 04 ou 05 contrôles routiers entre Garoua – Boulai et Bangui ». Notre informateur précise que « Tous ces contrôles routiers sont nuisibles et nous demandent de l’argent ; la seule différence est qu’il y a plus de contrôles routiers au Cameroun qu’en Centrafrique et au Tchad ». En outre, dénoncent certains camionneurs, les pots-de-vin n’ont pas encore été éradiqués et les routiers sont particulièrement mis en index.
Selon les camionneurs du corridor Douala – Bangui (linéaire Garoua – Boulai – Bangui), ils ne sont plus la cible des attaques des groupes armés centrafricains. Toutefois, confient-ils, ils sont parfois victimes d’attaques de malfrats qui profitent de la nuit et de la difficile montée de certaines collines, pour grimper en arrière, et décharger une partie de leur marchandise. Concernant la durée du voyage, les camionneurs déclarent passer 07 jours sur le corridor Douala – Bangui, non sans avoir décrié l’absence d’aires de repos, spécifiquement dans la partie camerounaise.
Douala – Ndjamena, un parcours fluide
D’une longueur de 1934 km, le corridor Douala – Ndjamena est long de 400 km en plus que celui Douala – Bangui. Mais paradoxalement, aux dires des camionneurs, c’est le corridor qui offre plus de fluidité, et enregistre nettement moins de pots-de-vin que celui de Douala – Bangui. Ce corridor qui passe par Touboro (Cameroun) et Moundou (Tchad) depuis le 1er trimestre 2022, est plus avancé pour ce qui est de la circulation des personnes et des biens. Les pratiques anormales y sont peu nombreuses, et notamment sur les 590 km du territoire tchadien. C’est le corridor sous-régional qui satisfait mieux les camionneurs. L’on compte moins de postes de contrôles, même les pots-de-vin versés sur ce corridor, pourtant plus long, sont de moitié inférieurs à ceux du corridor Douala-Bangui. Sur cet état de choses, ils déclarent que le corridor Douala – Ndjamena a moins de postes de contrôles. Malheureusement, la partie camerounaise demeure encore celle qui a plus de postes de contrôles, par rapport à la République Centrafricaine et au Tchad.
Des routes délabrées
Les camionneurs n’ont pas manqué de décrier le mauvais état des routes dû à l’absence d’entretien routier. Il s’agit plus exactement de l’absence d’entretien routier. « Comme la route est mauvaise, le camion tombe dans le trou. Il y a des accidents mortels à cause de ça. Tu évites le trou, et tu tombes sur l’autre voiture, et vous faites un face à face. Ça fait que le croisement est difficile », confie Hamadou Ousseni, chauffeur du corridor Douala – Bangui. Interrogé sur la condition physique du chauffeur pour un aussi long voyage, et s’il existe une procédure de relai des transporteurs pour la suite du voyage, Tidjani H, chauffeur sur le corridor Douala – Ndjamena affirme, « si nous sommes fatigués, on dort, et le voyage peut prendre neuf jours. D’ailleurs que le voyage est plus facile maintenant, parce qu’il y a déjà une route pour Kousseri – Ndjamena ».
Malgré une amélioration de la fluidité de la circulation sur les corridors Douala – Bangui / Douala – Ndjamena, il n’en demeure pas moins que beaucoup reste à faire pour une fluidité optimale de la circulation des personnes et des biens, afin de réduire les pratiques anormales à leur plus simple expression. A noter que cette enquête est commandée dans le cadre de l’Observatoire des pratiques anormales (OPA) sur les principaux corridors d’Afrique centrale. L’OPA a été mis en place dans le cadre du Programme d’appui à la gouvernance des infrastructures régionales et nationales en Afrique centrale (PAGIRN), par la CEMAC, et est financé par l’Union Européenne au titre du 11ème FED.