Sa stratégie de recours devant les juridictions africaines après son éviction de la présidentielle 2025


Suite à son exclusion de la course présidentielle camerounaise d’octobre 2025, le leader de l’opposition Maurice Kamto se prépare à porter son combat devant les instances africaines de protection des droits de l’homme, reproduisant une stratégie déjà utilisée avec succès après les élections de 2018.

Un scénario qui se répète

Le lundi 4 août 2025, la Cour constitutionnelle du Cameroun a définitivement écarté Maurice Kamto de la course à la présidentielle d’octobre. Cette décision fait écho à une stratégie déjà éprouvée par l’ancien ministre délégué à la Justice : porter le différend devant les juridictions africaines spécialisées dans la protection des droits de l’homme.

Déjà en 2018, après avoir contesté sans succès les résultats de l’élection présidentielle devant les juridictions camerounaises, Maurice Kamto avait saisi la Commission africaine des droits de l’homme et des peuples de l’Union africaine. Cette démarche avait porté ses fruits puisque l’institution basée à Banjul avait reconnu « la violation prima facie de la Charte africaine à l’occasion de la dernière élection présidentielle camerounaise d’octobre 2018 ».

Les options juridiques à sa disposition

La Commission africaine des droits de l’homme et des peuples

Cette institution, siégant à Banjul en Gambie, constitue généralement la première étape dans le processus de recours continental. La Commission a déjà autorisé par le passé « un examen préalable à l’éventualité de la saisine de la Cour Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples » pour Maurice Kamto contre l’État camerounais.

La Cour africaine des droits de l’homme et des peuples

Basée à Arusha en Tanzanie, cette juridiction supranationale représente l’échelon supérieur du système africain de protection des droits de l’homme. Le Cameroun ayant ratifié le Protocole de Ouagadougou, la Cour peut examiner les recours individuels contre l’État camerounais.

Une expertise reconnue

Maurice Kamto n’aborde pas ce terrain en novice. Agrégé des facultés françaises de droit et ancien président de la Commission du droit international de l’ONU, il a dirigé l’ouvrage de référence « La Charte africaine des droits de l’homme et des peuples et le protocole y relatif portant création de la Cour africaine des droits de l’homme : commentaire article par article ». Cette expertise lui confère une connaissance approfondie des mécanismes et procédures de ces institutions.

Les griefs probables

Selon les éléments disponibles, Maurice Kamto pourrait invoquer plusieurs violations :

Violation des droits politiques : L’exclusion arbitraire d’un candidat légitime du processus électoral constitue une atteinte aux droits politiques garantis par la Charte africaine.

Déni de justice : Les conditions douteuses de son éviction, liées à un conflit artificiel au sein du parti MANIDEM, pourraient être qualifiées de manœuvre dilatoire.

Atteinte à l’égalité devant la loi : L’application discriminatoire des règles électorales, d’autres partis ayant pu présenter plusieurs candidats sans objection.

Une stratégie politique et juridique

Au-delà de l’aspect purement juridique, cette démarche s’inscrit dans une stratégie politique plus large. En internationalisant le contentieux, Maurice Kamto cherche à :

  • Maintenir la pression sur le régime de Yaoundé
  • Sensibiliser l’opinion publique africaine et internationale
  • Préserver sa légitimité politique en tant que leader de l’opposition
  • Documenter les violations des droits de l’homme au Cameroun

Les précédents encourageants

L’expérience de 2018-2019 avait montré l’efficacité relative de cette approche. La reconnaissance par la Commission africaine des violations lors des élections de 2018 avait constitué un camouflet diplomatique pour le régime camerounais et renforcé la crédibilité internationale de Maurice Kamto.

Les défis à surmonter

Toutefois, plusieurs obstacles se dressent sur cette voie :

Les délais de procédure : Les recours devant les instances africaines peuvent prendre plusieurs années, bien au-delà de l’échéance électorale d’octobre 2025.

L’épuisement des voies de recours internes : Condition préalable indispensable, elle implique d’avoir tenté tous les recours possibles au niveau national.

La volonté politique des États : L’efficacité des décisions de ces institutions dépend largement de la pression exercée par les autres États membres de l’Union africaine.

Conclusion

La stratégie de Maurice Kamto s’inscrit dans une logique de combat juridique et politique de long terme. Même si ces recours n’aboutiront probablement pas avant l’élection d’octobre 2025, ils participent d’une démarche visant à documenter les violations des droits démocratiques au Cameroun et à maintenir une pression internationale sur le régime de Paul Biya.

Cette approche témoigne d’une vision stratégique qui dépasse le cadre électoral immédiat pour s’inscrire dans la construction d’un État de droit au Cameroun et en Afrique. Une bataille juridique qui, quels qu’en soient les résultats, contribue à l’émergence d’une culture démocratique continentale.



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